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Contre le « choc des savoirs », manifestation à Bordeaux et résistance à tous les étages

Ce samedi 25 mai, journée nationale contre la création de groupes de niveaux en 6e et 5e, plusieurs manifestations sont prévues dans la région. Enseignants et parents d’élèves sont particulièrement remontés contre cette réforme en Gironde, où 60% des collèges ont déjà participé à des opérations.

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Contre le « choc des savoirs », manifestation à Bordeaux et résistance à tous les étages
Chacun tient une pancarte l’assignant à un groupe de niveau fictif

Le « tri des élèves », parents et profs en veulent moins que jamais. Une manifestation aura lieu à Bordeaux ce samedi 25 mai dans le cadre d’une journée nationale de mobilisation. D’autres se dérouleront ailleurs dans l’académie (à Pau à 11h Place Clemenceau, à Bayonne à 11h Esplanade Roland Barthes, à Périgueux à 11h Palais de justice, à Mont-de-Marsan à 10h place Saint Roch).

Cette mobilisation fait suite à de nombreuses actions depuis le début de la lutte contre la réforme du « choc des savoirs » initiée par Gabriel Attal. Plusieurs opérations « collèges morts » ont été bien suivies en Gironde – 60% des collèges auraient participé à au moins l’une d’entre elle –, et des rassemblements devant le rectorat, dont un (fait rarissime) des directeurs d’établissement.

« On veut que nos enfants aillent bien »

Ce samedi, l’intersyndicale réunissant personnels de l’enseignement (CGT, FNECFP, , FSU, SGEN-CFDT, Sud, UNSA), parents d’élèves (FCPE) et lycéens (USL, FIDL, MNL) appelle à un « pique-nique festif » à 12h30 au Jardin botanique, avant un départ de la manif sur la place Stalingrad à 14h.

« On veut faire quelque chose de festif avec ce message : on veut que nos enfants aillent bien, et n’entrent pas dans un système de sélection à outrance, considère Corinne Devaux, de la FCPE33. On a vu les résultats catastrophiques de la réforme du lycée sur la santé psychologique des gamins. Là, dès le 1er jour de la rentrée, les enfants vont être notés, placés dans des groupes de bons, de moyens et de “nuls”, et mis en concurrence entre eux. » 

Cette séparation des classes en groupes de niveaux en français et en mathématiques entrerait en vigueur dès la rentrée de septembre 2024, pour les classes de 6e et 5e dans un premier temps. Du moins si le Conseil d’Etat n’annule pas le décret, contesté par le Sgen-CFDT et 5 parlementaires écologistes, dont la sénatrice de Gironde Monique de Marco.

« La colère des professeurs de collèges est très forte contre cette mesure qui change totalement nature de leur métier et stigmatise les élèves, indique Catherine Dudès, co-secrétaire départementale FSU. La position majoritairement suivie est claire : on ne participera pas à l’élaboration des groupes de niveaux. »

Forte résistance

Selon cette enseignante d’histoire-géo à Lormont, cette « réforme idéologique » n’est ni faisable techniquement « faute de salles de classes dans les établissements », ni souhaitable pédagogiquement, tous les travaux sérieux plaidant pour l’hétérogénéité des groupes d’élèves.

Aussi, « une forte résistance se met en place », et prend diverses formes, indique Laurence Laborde (co-secrétaire de la FSU) : de nombreux conseils d’établissement ont voté des motions contre la réforme, des enseignants démissionnent de leur fonction de professeur principal, d’autres s’apprêtent à refuser de faire passer les évaluations nationales, en primaire et au collège, ou de constituer les « fiches navettes » sur le niveau des élèves s’apprêtant à passer en second degré.

« Cela va changer nos conditions de travail puisque nous devrons trier les élèves, mais aussi nos relations avec les parents, qui vont chercher des explications et des responsables, explique Reynald Diranzo, secrétaire académique du Syndicat national Force ouvrière lycées et collèges. Je suis prof de maths, il va falloir que je fasse le service après vente d’une réforme dont je ne veux pas. »

Pour un « choc des moyens »

Face au « choc des savoirs », les syndicats revendiquent « un choc des moyens » : ils soulignent que cette réforme va se faire à moyens constants, c’est à dire avec des ressources en baisse puisque l’éducation nationale doit réaliser près de 700 millions d’euros d’économies, au risque de renforcer les inégalités entre territoires.

« Cette réforme va être financée au détriment d’autres choses, comme les dédoublements de classes en langues vivantes, et au moment où la crise du recrutement s’installe, avec des recours à des contractuels », poursuit Catherine Dudès.

Alors que 11000 journées de classe n’ont pas été assurées en mars 2024 en raison du manque d’enseignants, Laurence Laborde affirme que « cette réforme censée s’attaquer aux difficultés scolaires va être grandement prise en charge par des enseignants non formés ». L’enseignante dénonce « un changement d’objectif du service public » :

« Gabriel Attal est en train d’organiser structurellement l’école pour envoyer moins d’enfants jusqu’au brevet et au bac. Cela signifie qu’une part conséquente d’une tranche d’âge se retrouvera sans qualification sur le marché du travail, pour s’adapter à celui-ci qui a besoin de main d’œuvre peu qualifiée. »

Les organisations syndicales prévoient de poursuivre leurs actions de sensibilisation dans les prochaines semaines.


#choc des savoirs

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