L’ouverture à la concurrence du fret ferroviaire est au cœur des préoccupations des cheminots, dont l’appel à la grève a été relativement suivi en Nouvelle-Aquitaine : avant les évènements météorologiques de ce jeudi 21 novembre, ne devaient y circuler que 6 TER sur 10 et 1 Intercités sur 2.
Le traitement et le transport ferré de marchandise, jusque-là effectués par Fret SNCF, seront ouverts progressivement à d’autres entreprises. Les syndicats cheminots – CGT Cheminots, CFDT Cheminots, SUD Rail et UNSA-Ferroviaire – dénoncent un processus qui entraîne la suppression de 500 emplois à Fret SNCF, dans toute la France, dont une centaine dans la région Nouvelle-Aquitaine, estiment les syndicats.
L’enjeu écologique
La réforme du fret, amorcée en 2006, devait doubler la part des marchandises transportées par rail. Dix-huit ans plus tard, celle-ci aurait « chuté à 10 %, contre 20 % avant l’ouverture à la concurrence », rapporte Joël Vignerie, représentant de la CGT.
L’intersyndicale déplore en outre que « le gouvernement prêche l’écologie tout en démantelant l’outil de transport le plus écologique de France ».
« Casser l’outil industriel ferroviaire, c’est ouvrir la voie à une augmentation massive du transport routier, bien plus polluant et dangereux », alerte Jean-Sébastien Montès (UNSA).
À Bègles, la gare de triage Bordeaux-Hourcade n’est pas épargnée par ces mesures. Aujourd’hui, 60% de ce travail est assuré par le pôle de la Hourcade, « mais ce restant pourrait bientôt être transféré aux camions » explique-t-on côté syndicats. Les cheminots prédisent un engorgement des grands axes, notamment la rocade bordelaise, mais aussi pour l’émission de gaz à effets de serre qu’entraînerait la circulation des poids lourds.
Appel à un moratoire
Les syndicats dénoncent un « transfert de monopole » qui ne laisse aucun choix aux usagers, tout en fragilisant les droits des cheminots.
« Les entreprises qui décrochent ces marchés n’ont qu’un levier pour être compétitives : le dumping social. Cela signifie moins de droits pour les salariés et, à terme, un service de moindre qualité », expliquent-ils.
L’intersyndicale appelle le gouvernement à un moratoire sur la réforme du fret ferroviaire et réclame une loi de programmation des investissements ferroviaires pour moderniser le réseau, dont le financement reste largement insuffisant.
Selon eux, la France, avec 51 euros par habitant investis chaque année dans le ferroviaire, se situe loin derrière les pays européens : « Il est de 70 euros en Espagne, 115 euros en Allemagne, 174 aux Pays-Bas, 215 euros au pays, 477 en Suisse. Nous sommes les derniers de la classe ! » En l’absence de réponses, les syndicats prévoient une grève illimitée dès le 11 décembre.
Craintes pour les TER
Une autre inquiétude les assaille : la mise en concurrence des trains régionaux (TER), notamment en Nouvelle-Aquitaine, qui commencera par l’ex Poitou-Charentes dès 2028. La région sera en effet scindée en quatre zones (les ex-régions Limousin et Poitou-Charente, la région bordelaise et le Sud-Gironde), pour lesquelles seront lancées des appels d’offres. pour le choix des opérateurs. Ce qui, selon les syndicats, génèrera des coûts pour les usagers si ceux-ci diffèrent d’une zone à l’autre.
Les représentants syndicaux accusent le Conseil régional de ne pas tenir ses engagements, notamment sur la mise en place de clauses sociales protectrices. « Malgré nos relances, aucune garantie n’a été donnée. Les appels d’offres se font sans concertation avec les syndicats », regrettent-ils.
Interrogé, le vice-président de la région Nouvelle-Aquitaine chargé des transports et de la mobilité, Renaud Lagrave, affirme que des échanges ont bien eu lieu avec les syndicats, que leurs demandes sont « toujours en cours d’examen ».
« J’espère pouvoir leur apporter des réponses dans les semaines qui viennent », a-t-il indiqué en évoquant de possibles échanges à venir.
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