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« Là où les voix résonnent », le podcast de La Cimade sur les centres de rétention administrative

La Cimade a lancé un nouveau podcast en fin d’année 2024 avec un objectif : donner la parole à ceux qui sont enfermés en centre de rétention administrative. Pour sa première saison, l’association partage les témoignages de cinq personnes passées par ceux de Bordeaux et d’Hendaye.

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« Là où les voix résonnent », le podcast de La Cimade sur les centres de rétention administrative
Le podcast a été lancé en fin d’année 2024 par les équipes d’Hendaye et de Bordeaux.

Par soucis d’anonymat, ils ont été renommés Ayoub, Samuel, Karim, Ahmed et Ben. Tous les cinq ont accepté de raconter leur parcours de vie, de leur arrivée en France aux batailles administratives qui les ont menés en centre de rétention. Dans Là où les voix résonnent, série de podcasts financés et réalisés par La Cimade, ils livrent leur histoire.

« Les équipes de Bordeaux et d’Hendaye sont parties du constat qu’on ne donne pas la parole aux personnes enfermées en centre de rétention, c’est une parole qui est constamment invisibilisée. Le traitement médiatique se fait souvent avec un biais d’une grande négativité et on n’entend finalement jamais le quotidien et le point de vue de ces personnes-là », communique la Cimade de Bordeaux.

L’association est présente dans huit CRA : cinq en Métropole (Le Mesnil-Amelot, Rennes, Bordeaux, Toulouse et Hendaye) et trois en outre-mer (La Réunion, Guyane et Guadeloupe). Ce projet a été lancé à l’initiative de la section sud-ouest de l’association mais il a vocation à se nationaliser : libre à chaque délégation de se saisir de cet outil pour faire témoigner les personnes qui le souhaitent.

Cinq premiers témoignages

Chaque épisode dure une vingtaine de minutes. Les enregistrements se font lors d’appels passés depuis les cabines (dont les numéros sont accessibles à tous), via des notes vocales envoyées sur WhatsApp (puisqu’à la différence des prisons les personnes enfermées en CRA ont accès à leur téléphone), ou bien sont recueillis à leur sortie dans les locaux de la Cimade.

L’introduction est faite par des bénévoles de l’association avant de laisser place à la voix de celui qui a accepté de témoigner. Ainsi, dans le premier épisode de cette saison inaugurale, on écoute Ayoub nous parler de son arrivée sur le territoire français en 2009 à l’âge de 14 ans.

Pris en charge par l’aide sociale à l’enfance, il a pu étudier et obtenir deux diplômes dans le bâtiment avant de finir à la rue l’année de ses 18 ans. S’ensuivent des années de débrouille et de recherches infructueuses de petits boulots, puis des déboires avec l’alcool et la drogue, des « erreurs » comme il le reconnaît. Il fait plusieurs séjours en détention en région parisienne avant de déménager à Bayonne pour suivre sa compagne. Les choses ne s’arrangent pas pour lui puisqu’à la suite d’une garde à vue et sous le coup d’une OQTF, il est enfermé au CRA d’Hendaye, là où est recueilli son témoignage.

Une mission essentielle

Chaque épisode n’est diffusé qu’après la sortie du CRA de la personne en question. À la fin, une conclusion est faite sur sa situation, identique à la fin de cette première saison puisque les cinq témoins ont tous été expulsés…

« Ce n’est au final pas hyper représentatif puisque sur toutes les personnes qui passent en centre de rétention, moins de la moitié sont expulsées », assure Cécile Roubeix, bénévole à la Cimade.

Ce podcast est né dans un contexte incertain pour les associations qui interviennent dans les centres de rétention. Le 2 octobre dernier, le ministre de l’Intérieur Bruno Retailleau exposait dans les colonnes du Figaro sa volonté que « l’État soit plus exigeant vis-à-vis des associations qui interviennent en CRA », estimant que celles-ci sont « juge et partie ». Des déclarations forcément mal accueillies par les principaux intéressés :

« Ces déclarations là n’ont pas de sens dans la mesure où les associations qui interviennent en CRA n’ont absolument aucun pouvoir décisionnel. Nous on intervient pour que les personnes enfermées puissent exercer leurs droits et on est également présents pour rappeler régulièrement aux autorités les abus lorsqu’il y en a », justifie Émilie-Charlotte Caron, juriste en rétention et bénévole à La Cimade.

La possibilité de pouvoir « dénoncer les manquements qui sont faits par la préfecture » et ce « droit de témoignage qu’on donne aux personnes » restent selon la juriste « essentiels au bon fonctionnement d’une démocratie ». L’association projette d’enregistrer deux nouvelles saisons cette année, soit dix nouveaux épisodes.

En plus de pouvoir les écouter sur le site Là où les voix résonnent, les podcasts sont également diffusés sur toutes les plate-formes dont Deezer, Apple podcasts, Spotify et Amazon music


#La Cimade

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