« Contre » l’économie de guerre et « pour » le progrès social, voici les deux mots d’ordre principaux de la CGT pour la manifestation du 1er mai à Bordeaux.
« Certains nous disent que c’est fourre tout : pas du tout, on fait bien la jonction entre les deux » justifie Stéphane Obé, secrétaire départemental de l’Union CGT de la Gironde.
Le syndicat ne cache pas son inquiétude face à la montée des régimes autoritaires qui provoquent des tensions internationales. Les slogans en témoignent : « À bas l’État fascisé ! » et d’autres résolument antifascistes, portés par le contexte actuel. Avant le départ de la manifestation par le cours d’Albret, vers 10h30, la cortège accueille une « intersyndicale des plus larges de France », selon Stéphane Obé.
Parmi les organisations réunies, on retrouve, en plus de la CGT, FO, FSU, Solidaires, l’UNSA et deux organisations étudiantes, l’Unef et l’Union étudiante. Un groupe de gilets jaunes est également présent, avec la conseillère municipale d’opposition Myriam Eckert en tête, la fameuse chasuble sur le dos.
« Pour la paix juste et durable, nos retraites et nos salaires »
Parmi les revendications nationales, l’abrogation de la réforme des retraites de 2023 qui fixe l’âge légal de départ à 64 ans, ainsi qu’une augmentation générale des salaires :
« Pour nous, la paix n’est pas qu’un état de non-guerre : c’est aussi pouvoir vivre dignement au quotidien, notamment grâce aux salaires, à des services publics renforcés et des garanties sociales. Ce 1er mai, on appelle à reconduire le mouvement à partir du 5 juin prochain, avec pour mot d’ordre l’abrogation de la réforme des retraites », déclare Stéphane Obé.
Julien et François, salariés de chez Dassault Aviation à Martignas-sur-Jalles, sont dans le cortège. Au-delà des mots d’ordre syndicaux, les deux militants font part d’un conflit social en cours au sein de leur entreprise. Un mouvement de grève débutera dès le 9 mai sur leur site avec, parmi les revendications, la revalorisation des salaires et la redistribution des bénéfices de l’entreprise :
« À la CGT, on demande une augmentation mensuelle de 140 euros. L’intersyndicale, à laquelle nous participons avec la CFE-CGC, FO et la CFDT, se bat aussi pour la part d’intéressement des salariés qui ne fait que baisser. À Martignas, deux ingénieurs sont partis ces dernières années, six à l’échelle nationale : c’est du jamais-vu chez Dassault, les salaires ne sont plus du tout attractifs », rapporte Julien. « Vu le niveau de remplissage du carnet de commandes et le contexte actuel, c’est totalement contradictoire », poursuit François.

Journée internationale des travailleuses et travailleurs…
Parmi les manifestants, nombreux sont ceux venus exprimer leur soutien « aux travailleurs du monde entier », un slogan entonné tout au long de la matinée depuis le micro du camion du syndicat Solidaires. Avec la revendication d’une « paix durable », les mêmes slogans sont partagés, notamment par le NPA, appelant à s’élever contre « le capitalisme et ses tyrans, ses guerres et ses licenciements. »
Ali, la soixantaine et ouvrier BTP à Bordeaux, se tient aux côtés de la banderole de l’Union patriotique des travailleurs du Kurdistan. « On est des travailleurs ici, et on représente aussi ceux du Kurdistan pour le 1er mai », précise-t-il, soulignant « être tourné vers l’avenir », à la lumière du soulèvement populaire turc face à l’arrestation du maire d’Istanbul, Ekrem İmamoğlu. Ce Bordelais d’adoption espère un basculement démocratique en Turquie, porté par le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), alors que certains responsables du mouvement ont appelé au dépôt des armes.
Un peu plus loin dans le cortège, alors que la manifestation bat son plein cours Alsace-Lorraine entre deux couplets de l’Internationale, Désiré exhibe une pancarte appelant à l’unité des travailleurs et des étudiants burkinabés. Salarié du secteur de la santé dans l’agglomération bordelaise, le trentenaire, originaire de la « patrie des hommes intègres », tenait à être présent à la manifestation du 1er mai :
« Je suis là contre les guerres : on injecte tellement d’argent dans l’armement et pendant ce temps, la faim ne recule pas dans le monde. L’humanité produit tellement qu’on pourrait régler tous les problèmes sociaux : on travaille pour le social, pas pour accumuler indéfiniment des richesses. »
… et des droits humains dans le monde
Un contexte mondial marqué par la montée de l’extrême droite et la recrudescence des guerres, sur lequel alertent également les militants d’Amnesty International. Il y a quelques jours seulement, l’ONG publiait son rapport sur la situation des droits humains dans le monde, quelques mois après ses conclusions sur le génocide en cours à Gaza :
« Dans des pays comme la Chine ou la Russie, les droits syndicaux sont criminalisés, empêchant les ouvriers d’exprimer leurs revendications. Amnesty, qui se fonde sur la Déclaration universelle des droits de l’homme, continue de défendre le droit à manifester et le droit syndical partout à travers le monde », explique Michelle Poussard, co-secrétaire d’Amnesty International Bordeaux.
La manifestation s’est achevée aux alentours de 12h30 place de la Victoire, sans incident.
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