Média local avec zéro milliardaire dedans

Pour continuer à exister, les kiosques de Bordeaux doivent se réinventer

Ce samedi 3 mai, journée mondiale de la liberté de la presse, l’opération Au kiosque citoyen permettra au public d’échanger avec des journalistes. A Bordeaux, cela se passera chez Basta, place Pey Berland, qui incarne la relève des kiosquiers, avec des médias indépendants et une activité diversifiée.

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Pour continuer à exister, les kiosques de Bordeaux doivent se réinventer
Le kiosque Basta

« On voit l’attachement des gens au format du kiosque, un lieu culte de l’espace public. On fait aussi office de tourisme, assistance sociale, aide à l’achat de tickets de tram… Bref, on crée du lien dans la ville. »

Maxime Morcelet ne voit pas son nouveau job comme un simple commerce. Avec sa complice Manon Locteau, il a repris fin 2024 le kiosque de la place Pey Berland pour en faire un lieu « news and coffee » : des journaux, bien sûr, mais aussi quelques tabourets pour déguster sur place un petit café.

Et aussi des titres confidentiels

« Notre projet de reprise du kiosque était axé sur une sélection de revues et de magazines indépendants et engagés », rembobine Maxime. Dans un premier temps, Mediakiosk est réticente à leur accorder la concession de l’espace, vide depuis deux ans et demi. Finalement, cette filiale de l’entreprise de mobilier urbain JC Decaux, qui exploite les 6 kiosques appartenant à la mairie de Bordeaux, accepte la candidature du duo, à condition qu’il diffuse également l’ensemble de la presse généraliste.

On peut donc trouver chez Basta, le nom du kiosque de la place Pey Berland, tous les quotidiens nationaux, la presse régionale, les hebdos et mensuels traditionnels… Conformément à leur ambition, les deux kiosquiers mettent aussi en avant des titres plus confidentiels, donnant une large place à la culture et à l’écologie, à l’instar de Fracas, Climax ou Soif (ces deux derniers titres étant réalisés par des équipes en partie bordelaise).

« Notre dernier coup de cœur, c’est Invendable, une revue dont chaque numéro est intégralement constitué de reportages dans un seul pays », souligne Manon Locteau.

L’attractivité du papier

Alors que l’activité presse tend à décliner, les kiosquiers croient toujours à l’attractivité du papier, citant les bonnes ventes toujours réalisées par Le Canard Enchaîné ou le Un. Pour Marc Bollaert, directeur de Mediakiosk, « les kiosques vont plutôt bien en ce moment par rapport au marché de la presse, malheureusement très attaqué, et alors que de nombreux points de vente ferment » :

« Alors que les dépositaires évoquent une baisse des ventes globales de 3% à Bordeaux en 2024 par rapport à l’année précédente, nos kiosques ont vu leur chiffre progresser de 10%, de 16% à la Victoire, dont nous avons modernisé les linéaires, et qui bénéficie d’un climat plus calme sur la place. Il contribue d’ailleurs à sa pacification, comme tous les kiosquiers qui ont un rôle de vigie de quartier. »

Et de plus en plus d’animations de l’espace public : Basta ambitionne ainsi de créer des évènements avec des DJ sets dans le kiosque. Celui de la place de Caudéran, rouvert très récemment, a été autorisé par la Ville à installer des tables et des chaises pour accueillir un public assis. Une exception au règlement des terrasses, qui ne le permet théoriquement pas aux établissements n’ayant pas de toilette publique, « car cela permettait d’occuper l’espace et n’entrait pas en concurrence avec les commerçants des abords », selon Sandrine Jacotot, adjointe en charge des commerces.

Diversification essentielle

Cette diversification s’avère essentielle au modèle économique de ces travailleurs indépendants, dont certains sont souvent contraints de renoncer, à l’instar du kiosquier de la place Paul-Doumer, qui a cessé son activité en 2020. Basta s’est résigné à faire office de points de vente pour la Française des jeux, d’autres font point relais pour les colis…

« Le premier objet doit rester la vente de la presse, explique Sandrine Jacotot. La seule exception, c’est le kiosque de la place Tourny, pour lequel on n’arrivait pas à trouver de repreneurs indépendants, et qui a été confié à un producteur de soja de la région pour mettre en avant ses produits, des crêpes et des glaces. Mais le modèle ne fonctionne pas très bien, et nous sommes toujours à la recherche de la bonne formule. »

Le kiosque pourrait donc évoluer d’ici l’année prochaine. Pour la place Paul-Doumer, Mediakiosk et la mairie espèrent une réouverture avant l’été 2025. Un éditeur de la région est sur les rangs, pour présenter ses livres, en plus des journaux.


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