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Les Girondins de Bordeaux « sauvés » à quel prix ?

Faute de candidat à la reprise des Girondins de Bordeaux, le tribunal de commerce de Bordeaux a validé le plan d’apurement présenté par Gérard Lopez. Si le club échappe à la liquidation et va pouvoir rester en National 2, a tranché la DNCG, nombre de ses créanciers se voient lésés par le jugement, à commencer par Bordeaux Métropole.

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Les Girondins de Bordeaux « sauvés » à quel prix ?
Les Girondins de Gérard Lopez en sursis

TINA. There is no alternative, il n’y a pas d’alternative en bon français, le mantra néo-libéral de Margaret Thatcher s’applique parfaitement à la situation des Girondins de Bordeaux. Ce mardi 24 juin, le tribunal de commerce de Bordeaux a en effet validé le plan de redressement de Gérard Lopez faute de plan B. En fin de journée, le gendarme financier du foot français, a donc autorisé le club à rempiler pour une nouvelle saison en N2, la quatrième division, avec un encadrement des salaires.

Le tribunal aurait pu céder le FCGB à un repreneur s’il s’était présenté avec une offre mieux-disante pour les créanciers du club – au nombre de 431, pour une dette de 98,27 millions d’euros. Mais celle d’Oliver Kahn, la seule officiellement en lice, a rapidement été jugée irrecevable, faute de dépôts des garantie exigés et en raison de conditions suspensives posées par l’ex international allemand.

« Tous les scénarios envisagés pour redonner au club son rang et sa superbe exigeaient des financements entre 20 et 40 millions d’euros et supposaient de tenir économiquement et sportivement sur plusieurs années. Même quelqu’un comme Oliver Kahn a fini par renoncer devant l’effort », relève dans son jugement le juge commissaire.

Gagnants et perdants

Impossible également d’accorder un énième sursis à l’actuel président et actionnaire d’un club qui n’a pourtant cessé de dégringoler économiquement et sportivement depuis son arrivée en 2021 : la liquidation, synonyme d’effacement total de la dette, n’était pas une option, Gérard Lopez proposant de rembourser une petite partie de celle-ci (22 millions d’euros, peut-être le double en cas de bons résultats sportifs) à ses créanciers.

Certains sont particulièrement choyés. C’est une obligation dans le cas de l’État (on parle de dettes non rémissibles), qui va notamment récupérer 100% des 9 millions d’euros de TVA, d’arriérés d’Urssaf et de versements aux prud’hommes dus par les Girondins. C’est aussi le cas de Fortress et King Street, les deux fonds d’investissement américains, ex-propriétaires du club, et de Gérard Lopez lui-même (41 millions prêtés au club).

Aussi, les « classes de parties affectées », regroupant les créanciers en 15 catégories différentes, ont majoritairement voté pour le plan d’apurement, au nom du « mieux que rien ». Seules 5 classes ont voté – en vain – contre, parmi lesquelles figurent les fournisseurs (4,8 millions de dettes), des clubs en attente d’indemnités de transferts impayées (Guingamp, Lille…) et surtout les collectivités locales – la Ville de Bordeaux, auquel le FCGB doit 36000 euros de loyers pour le Haillan, et surtout la Métropole.

« Difficile de s’en réjouir »

Pour soutenir les Girondins, celle-ci avait repoussé à de meilleurs lendemains le versement des loyers du stade Matmut Atlantique, pour un montant s’élevant à 19,75 millions d’euros. Gérard Lopez n’est disposé qu’à lui en payer moins de 3 millions, ce qui ne satisfaisait pas Christine Bost, présidente de la Métropole.

« A défaut de toute autre solution, l’homologation du plan de continuation par le tribunal de commerce est une bonne nouvelle pour le club, réagit-elle néanmoins auprès de Rue89 Bordeaux. Pour la Métropole cela signifie un écrasement de 85% de la dette que le club a à son égard. Difficile de s’en réjouir mais une liquidation aurait signifié un écrasement total de celle-ci et surtout la relégation du club en régional voire sa disparition. »

De nombreux doutes subsistent encore sur son avenir, souligne néanmoins le jugement du tribunal de commerce. Ainsi, une grande partie des remboursements par Gérard Lopez sont liés à des « clauses de retour à meilleure fortune ». Par exemple, l’abandon des dettes envers la métropole sera ramené de 85% à 65% si le club remonte en Ligue 2 dans les 8 ans, ou en L1 dans la décennie.

Trois scénarios sportifs

C’est aussi vrai pour le business plan, qui table sur 3 scénarios, dont un très optimiste de remontée en première division dès la saison 2030-2031, et nécessiterait un besoin en trésorerie de 33 millions d’euros, et un pessimiste de remontée en N1 dès 2026, mais sans accession en L2 la saison suivante, qui coûterait 69 millions d’euros…

« S’agissant du projet d’entreprise, le plan repose sur des scénarios sportifs ambitieux dont la réalisation comporte nécessairement un aléa, explique le mandataire judiciaire dans le jugement. Les projections sportives depuis la reprise par l’actionnaire actuel ne se sont jamais réalisées, qu’en sera-t-il à l’avenir ? Il n’existe pas d’alternatives de sorte que ce plan, malgré ses fragilités et les sacrifices imposés aux créanciers non financiers, doit s’imposer. »

Pendant les premières années du plan, les besoins d’exploitation et d’apurement des dettes devront être financés par des concours nouveaux de trésorerie ou de capital, faut de rentrées financière suffisantes en N2. Tout cela « ne tient que par la seule volonté de l’actionnaire principal, M. Gérard Lopez, lequel demeure donc indispensable au financement », pointe le jugement.

« Le critère du meilleur intérêt est évidemment respecté, estime le ministère public dans le jugement. L’engagement de Gérard Lopez d’apprter entre 30 et 69 millions d’euros sur la période du plan ainsi que le maintien des emplois [NDLR : 10 salariés administratif actuellement en N2, 15 en L1] en atteste. »

La veille de la décision, le président avait apporté 9 millions d’euros, qui permettront de commencer les remboursements, et de préparer la nouvelle saison, avec un budget annuel de 7 millions d’euros. Et la nécessité de remplacer plusieurs joueurs partant du club, dont Andy Carroll.


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