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LGV Bordeaux–Toulouse : 28 associations et 230 élu·es demandent la suspension immédiate de la consultation publique

Alors que le conseil d’orientation des infrastructures est à Bordeaux ce lundi pour discuter du GPSO, un front commun d’associations et d’élu·es dénonce une « consultation au rabais » sur les études d’impact environnemental de la LGV Bordeaux-Toulouse, et alerte sur un possible passage en force, rappelant le précédent de l’A69.

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LGV Bordeaux–Toulouse : 28 associations et 230 élu·es demandent la suspension immédiate de la consultation publique
Lucmau en Gironde, Vallée du Ciron, Sarabande 2024

La conférence Ambition France Transport, organisée ce printemps, avait conclu à la nécessité de confier au Conseil d’orientation des infrastructures (COI) le réexamen des « grands projets ferroviaires ». Le COI rencontre ce lundi à Bordeaux la Société du Grand Projet Ferroviaire du Sud-Ouest et des élu·es favorables au projet de LGV Bordeaux–Toulouse.

Pourtant, alors que ce travail de réflexion est en cours, les préfets – de la Région Occitanie et de Haute-Garonne, de la Région de Nouvelle-Aquitaine et de Gironde, de Lot-et-Garonne, de Tarn-et-Garonne – ont décidé de lancer une « participation du public par voie électronique » (PPVE), avant même d’avoir reçu l’avis de l’Autorité environnementale.

Les recours en référé contre cette consultation ayant échoué, 28 associations et 230 élu·es du grand Sud-Ouest demandent sa suspension sine die dans un courrier adressé ce jour et envoyé à la presse ce lundi 17 novembre.

Une procédure très contestée

Les signataires sont des élu·es de sensibilités politiques variées, parmi lesquels on retrouve des député·es, des conseillers départementaux et régionaux, et des maires, ainsi que des associations rurales et urbaines et des citoyen·nes. Ils disent refléter « l’opposition massive » dans les communes traversées par le tracé, mais aussi au-delà.

Ils défendent l’idée d’un projet alternatif, plus respectueux de l’environnement, des finances publiques et des besoins réels de mobilité et demandent « respectueusement de suspendre la consultation du public ».

Leur courrier alerte sur les « conséquences possibles d’une telle précipitation » et de la consultation en cours. Celle-ci pourrait permettre, dès le 1er décembre, d’obtenir les dérogations à la destruction de l’environnement nécessaires à des investigations préalables, et de lancer d’ores et déjà les défrichements préalables aux travaux.

Les opposants jugent ces derniers prématurés alors que le COI n’a pas encore rendu ses préconisations. Le groupe de suivi PPVE de LGV Non Merci a également interpellé les membres de ce conseil.

Le spectre du scénario de l’A69

« Allons-nous vers le même scénario que pour l’A69 ? », demandent les signataires. Selon eux, la raison impérative d’intérêt public majeur (RIIPM), indispensable pour obtenir de nombreuses dérogations, reste très incertaine dans ce dossier.

Ils alertent sur le risque de défricher 1 000 hectares pour un projet qui pourrait être ajourné, son budget n’étant pas bouclé, et qualifient de « ridiculement faible » le report modal attendu de la voiture vers le train. Quant au désenclavement, les questions persistent : « De quoi parle-t-on exactement ? » Plusieurs habitants redoutent des emprises de 100 à 200 hectares autour de leurs villages, synonymes de longs détours quotidiens.

Le registre numérique de la PPVE traduit les nombreuses préoccupations des riverains, selon le communiqué. Quatre contributions sur cinq portent sur les ressources en eau, le risque incendie dans le massif des Landes de Gascogne, le coût du projet pour des déplacements « concernant moins de 10% des usagers du train », ou encore les besoins de mobilité du quotidien.

Des sylviculteurs, maraîchères, naturalistes, chasseurs, habitants urbains et ruraux convergent ainsi pour demander l’arrêt en urgence de la PPVE et, plus largement, la remise en cause du projet.

« Passage en force »

Dans un courrier du 21 octobre 2025, plus d’une dizaine d’associations avaient déjà alerté les préfectures du Sud-Ouest sur le caractère restrictif de cette consultation, menée exclusivement en ligne et limitée à la première phase du GPSO. La mobilisation importante des habitantes et habitants a confirmé un sentiment de « passage en force ».

Si la procédure de référé liberté déposée à Toulouse n’a pas abouti, les critiques restent nombreuses. Le dossier, qui atteint 34 430 pages, est jugé « illisible et difficile à appréhender ». La consultation dure 30 jours, sans possibilité de participation hors plateforme électronique. Les panneaux d’information, placés en bord de départementales hors des communes, sont considérés comme peu accessibles.

La mise à jour du dossier est par ailleurs décrite comme partielle au regard de l’étude d’impact de 2014, notamment dans les analyses d’associations et dans les remarques de l’Autorité environnementale, qui a pointé de « très importants manquements ». Selon ces organisations, l’étude ayant conduit à la DUP est obsolète, tant dans ses hypothèses que dans son analyse socio-économique.

Un arrêté suscite la colère

Parallèlement, un arrêté préfectoral daté du 4 novembre a suscité la colère de nombreux maires du Sud-Gironde, dans un territoire opposé au projet de LGV. Selon Sud Ouest, le document, adressé aux 24 communes concernées par le tracé, autorise « l’occupation temporaire sur les propriétés privées » afin de permettre aux agents de SNCF Réseau et aux entreprises mandatées d’effectuer des études techniques, incluant des diagnostics archéologiques préventifs et des sondages géotechniques « de moins d’un mètre de profondeur ».

Si l’arrêté exclut toute intervention à proximité immédiate des habitations, il rappelle aussi que certains propriétaires refusent déjà l’accès à leurs terrains, et exige qu’ils « suspendent toute intervention » susceptible de perturber les travaux. Pour les élus, chargés « chacun en ce qui le concerne » d’exécuter la mesure, la pilule passe d’autant plus mal qu’ils sont massivement opposés au projet.

Plusieurs maires, de Balizac à Castres-Gironde en passant par Lucmau, dénoncent une tentative de passage en force et refusent de transmettre le document aux administrés ou de communiquer les noms des propriétaires. Ils espèrent que ce refus collectif fera « un petit bâton dans les roues de la LGV », en attendant que « la raison reprenne ses droits ».


#conseil d'orientation des infrastructures

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