Enquêtes et actualités gavé locales

Pour les 10 ans de votre média : objectif 2000 abonné⋅es

30/04/2024 date de fin
733 abonné⋅es sur 2 000
Pour ses 10 ans, Rue89 Bordeaux propose un abonnement à 10€/an et vise les 2000 abonné.es

Budget et quartiers au dernier conseil municipal de l’année

Entre le vote du budget et celui du pacte de cohésion sociale et territoriale, l’ordre du jour du dernier conseil municipal de l’année était chargé. Alain Juppé craignait de passer sa soirée au Palais Rohan, ça n’a pas loupé.

Cet article est en accès libre. Pour soutenir Rue89Bordeaux, abonnez-vous.

Budget et quartiers au dernier conseil municipal de l’année

Le pacte de cohésion présente les projets des quartiers de Bordeaux jusqu'en 2020 (Xavier Ridon/Rue89 Bordeaux)
Le pacte de cohésion présente les projets des quartiers de Bordeaux jusqu’en 2020 (Xavier Ridon/Rue89 Bordeaux)

Le conseil municipal s’annonçait « nocturne » selon les termes d’Alain Juppé. Et à voir son visage, ça ne lui fait pas plaisir. Au menu du dernier conseil municipal de l’année, le budget primitif. L’adjoint aux finances, Nicolas Florian égrène les chiffres en notant que notamment Bordeaux est l’une des villes où la taxe foncière a le moins augmenté, que l’investissement atteindra 85 millions d’euros et que le prix du stationnement en centre-ville passera de 2,20 à 2,50 euros de l’heure.

L’édile a eu beau prévenir les intervenants de faire court, le socialiste Matthieu Rouveyre semble prendre plaisir à exprimer point par point son désaccord. Se basant sur les chiffres donnés aux conseillers, l’élu a refait les comptes :

« Sur 100 euros comment se divise le budget ? On arrive à des chiffres stupéfiants. Seulement 1,02 euros va au logement et 2,40 euros vont au social et à la santé. »

Contre 3,83 euros à la Cité du vin et 2,50 au nouveau stade, assure l’élu municipal. La réaction du conseil oscille entre rire et huée. Matthieu Rouveyre continue sur l’évolution des dépenses sur les 5 dernières années. Graphique à l’appui, il énumère. La part que représente la culture sur 5 ans a baissé de 20 %. La santé et le social ? -41%.

« C’est un budget qui sacrifie le quotidien, le vivre ensemble, la proximité et qui sacrifie tout ça pour le prestige et le faste. »

« Nos téléspectateurs ne doivent rien y comprendre »

Nicolas Florian s’agace de ces calculs jugés approximatifs, si ce n’est « mensongers ». Fabien Robert, adjoint à la culture, souligne que le budget de cette dernière passe de 35 millions d’euros en 2015 à 42 millions l’an prochain. Alain Juppé songe peut-être à David Pujadas (ou à Julien Lepers ?) lorsqu’il stoppe là le débat :

« Nos auditeurs et nos téléspectateurs ne doivent rien y comprendre », pensant probablement aux quelques spectateurs et internautes qui assistent à la scène.

Après près de 3h de débat et une dizaine de prises de paroles, le budget est voté malgré l’opposition du PS, des écologistes et du Front National. L’autre point principal de la séance est plus consensuel.

Il aura fallu 18 mois de travail avec les huit maires de quartiers et les habitants pour aboutir au pacte de cohésion sociale et territoriale. Pour la mairie de Bordeaux, le document doit définir les grands actes et projets qui s’appliqueront dans les quartiers de la ville pour les six prochaines années. La concertation avait été lancée en novembre 2014 à l’occasion du Grand débat organisé à Darwin par la mairie.

Cartographie des besoins

Un an plus tard, derrière le slogan « Construire l’avenir ensemble dans votre quartier », le maire de Bordeaux explique que « Rome ne s’est pas faite en un jour » et que Bordeaux ne déroge pas à la règle. Le discours est désormais bien connu : « les temps ont changé. [Il faut] garantir un service public de qualité tout en réalisant des économies ». C’est l’occasion aussi de rappeler que 70% du budget d’investissement de la Ville sont consacrés aux équipements de proximité. Après avoir recensé les besoins sociaux, ce sont les projets de la commune qui ont été cartographiés.

« Chaque Bordelais doit bénéficier de deux droits : droit à la ville et droit à l’initiative, que la vie associative soit consolidée », résume Alexandra Siarri, en charge du dossier.

Dans les quartiers en pleine transformation, les maîtres-mots sont réhabilitation, construction et sécurité. A Bordeaux Sud, les projets se mêlent à ceux de Bordeaux [Re]centres et de la mutation du quartier : favoriser la « diversité de l’offre commerciale » à la Victoire, débuter les travaux du cours de l’Yser, accompagner les squatteurs délogés, installer des caméras de surveillance sur les cours de la Marne et de l’Yser et dans le quartier de Paludate…

Dans le quartier de la Bastide, les immeubles sortent de terre et la vie associative est à développer au même rythme que la construction et la réhabilitation d’écoles. La construction d’écoles est également inscrite aux Bassins à Flot et à Ginko dans les projets du Bordeaux Maritime où, au-delà de la réhabilitation du centre d’animation des Aubiers, un large chapitre s’attelle à l’insécurité souvent dénoncée : plus de police municipale, plus de vidéosurveillances au Port de la Lune, plus de sécurité routière.

Pour la zone Chartrons – Jardin Public – Grand Parc, les projets se concentrent autour de la partie la plus populaire. Il faut faire revenir des commerces, créer des logements pour les femmes isolées, un accueil pour les jeunes enfants, réhabiliter la salle de spectacle

Deux millions d’euros mobilisés

Dans le quartier Tauzin – Saint-Augustin, la vie semble plus douce, où un marché doit être créer et les autres développés ; à Caudéran, une commission réfléchira à la mise en place d’un bus à Haut Niveau de Service ; dans le centre, on se chargera de créer plus de 5000 places de stationnement résidant entre les cours et boulevards et on traquera les actes de délinquance sur l’esplanade Mériadeck ; rendre plus attrayant les aires de jeux, places et jardins est au cœur des projets pour les quartiers Nansouty et Saint-Genès.

« La ville fait le choix de consolider l’existant, affirme Alexandra Siarri, et d’octroyer des moyens supplémentaires pour confirmer les missions vers les Bordelais notamment vers les centres sociaux. »

Deux millions d’euros sont ainsi mobilisés dont près de la moitié se dirige vers les associations favorisant la formation et l’accès à l’emploi. Près de 700 000 euros reviennent aux centres sociaux, 247 000 euros aux associations aidant les plus précaires, 100 000 euros pour la culture et l’éducation et 66 000 euros revient à la sécurité et la tranquillité publique. Mais qui dit engagement financier dit « augmentation dans la qualité et l’exigence » pour Alexandra Siarri.

Dernier conseil entre l'agacement de Nicolas Florian et l'impatience d'Alain Juppé. (Xavier Ridon/Rue89 Bordeaux)
Dernier conseil entre l’agacement de Nicolas Florian et l’impatience d’Alain Juppé. (Xavier Ridon/Rue89 Bordeaux)

Politique de la ville

Le débat se tend lorsque l’élu du Front national, Jacques Colombier, s’inquiète des subventions attribués à des « associations devant resserrer le lien social qui ont presque une délégation de services publics » dans le cadre d’une politique de la ville qui serait « un gouffre financier », avec des « résultats discutables », voire des « objectifs politisés ».

Dans le jargon frontiste, il dénonce pêle-mêle l’association Défense des exclus pour la formation et l’information (« émanation de la Ligue de l’enseignement… ça transpire assez le PS si ce n’est l’UMPS ») ou encore l’Association de solidarité avec tous les immigrés (« nous devrions nous occuper des nôtres avant les autres »).

Alexandra Siarri s’étonne alors surtout de l’abstention du Front national dans une délibération qui couvre les huit quartiers et touche « tous les publics et tous les Bordelais. Les bras m’en tombent. Vous renoncez à tous les budgets qui permettent d’aider les publics » fragiles. Socialistes et écologistes ne pipent mot et opinent. Alain Juppé clôt le débat :

« Si le Front national n’a pas prospéré à Bordeaux, c’est peut-être que nous avons une bonne politique de la ville. »

La délibération est votée. Le dernier point arrivant sur la table, les élus commencent déjà à ranger leurs affaires et à remettre leur manteau, mais Pierre Hurmic s’accroche. Sept ouvertures le dimanche après 13h peuvent être autorisés, par l’entremise de la loi Macron, pour les commerces alimentaires. L’écologiste a juste le temps de marquer son opposition, avant qu’Alain Juppé ne souhaite de bonnes fêtes de fin d’année aux conseillers municipaux, conviés à prendre un pot dans la salle voisine.


#Alain Juppé

Activez les notifications pour être alerté des nouveaux articles publiés en lien avec ce sujet.

Voir tous les articles

À lire ensuite


L’œuvre d’art que Pierre Hurmic trouve « particulièrement laide » n’était pas prévue place de la Victoire
Législatives : toujours orpheline de Juppé, la droite girondine déboussolée
Plus d'options