350 contributions d’internautes avec 90% de réponses de la mairie, 500 visites aux permanences des élus sur la plaine des sports les mercredi et vendredi, deux comités de pilotage avec 50 personnes autour de la table… Adjoint au maire en charge de la proximité, Jean-Louis David multiplie les chiffres témoignant à ses yeux d’une concertation modèle de la part de la Ville de Bordeaux sur le devenir du Parc Lescure.
Et « à la mi-temps du match », rien n’est selon lui joué. Ce vendredi à l’hôtel de Ville, l’élu du quartier veut en effet montrer que la mairie entend les critiques, y compris des riverains et associations les plus remontés contre l’avant-projet du promoteur Adim (filiale de Vinci) et des architectes Ferret et Prost.
Celles-ci sont « de nature à enrichir la nouvelle proposition que le groupement devra faire avant le 15 mai prochain ». Le projet sera ensuite éventuellement validé par Alain Juppé et présenté au conseil municipal du 6 juin. Comment peut-il être encore amendé ? Jean-Louis David a pointé 4 « gros sujets » remontant de la concertation, à commencer par l’avenir de la piste d’athlétisme, actuellement aux normes, mais qui, dans le projet actuel, n’est plus ovale et ne fait plus 400 mètres.
« La première demande, est de retrouver un anneau et une plaine de sports qui ressemble plus à une plaine de sports qu’à un jardin », indique l’élu qui dit partager sur ce point les doléances de ses concitoyens.
« Objectif zéro argent public »
Il les rejoint aussi sur la question du stationnement, que le collectif pour la préservation de Lescure voudrait faire passer de 400 à 800 places. Une certaine appréhension se serait également manifestée quant au projet de laisser le site entièrement ouvert :
« Les habitants voulaient initialement pouvoir traverser le parc Lescure, alors que la coupure, physique et sociologique, est aujourd’hui très importante entre les deux quartiers de part et d’autre du stade, poursuit Jean-Louis David. Mais certains riverains sont inquiets pour des raisons de sécurité, quant à la fréquentation du lieu la nuit ou la possibilité de laisser les enfants aller seul au stade. »
La mairie est en revanche plus circonspecte quant aux inquiétudes des riverains sur les constructions de logements (123 prévus sur le site de 12 hectares, plus une résidence)
« L’objectif d’Alain Juppé, c’est zéro argent public investi dans la rénovation du site. Son équilibre économique dépend de la construction et de la vente de ces logements, qui permettra de financer les dépenses occasionnées par la rénovation et la mise aux normes du stade. C’est le seul bémol qui fait que le projet sera ou pas réalisable. »
Aux premières loges
L’hypothèse d’un abandon complet du projet n’est pas écartée si cette condition là n’est pas réunie, assure la Ville. Mais celle-ci défend les grandes lignes du dossier, et notamment la création de commerces, dont une halle façon Capus côté boulevard :
« Les habitants sont demandeurs d’une offre de commerces de proximité, insiste Maribel Bernard, adjointe au maire en charge du commerce. Celle-ci servira une population nombreuses, avec notamment les salariés du CHU. Il y aura un supermarché, un coiffeur et un pressing. Cette offre manque, et Ville Envie (le prestataire chargé de ce volet) sait bien faire. La surface fera 6500 m2, on est loin des 50000 m2 de Mériadeck. »
Mais cela sera tout de même une rentrée d’argent pour la Ville, propriétaire du stade, ou le délégataire de service public, qui percevra des loyers – le modèle économique n’est pas encore arrêté.
Hors de question en revanche que l’UBB (Union Bordeaux-Bègles) paye davantage pour la location du stade, prévient Laurent Marti, le président du club de rugby, nouveau résident de Chaban :
« La condition de notre soutien au projet, c’était que la jauge du stade soit au moins de 25000 places. On faisait 28000 spectateurs de moyenne la saison dernière, mais cela se jouait sur les 10 plus grosses affiches. En jouant 3 grands matches au Stade Matmut Atlantique, cela ne fait plus qu’un ou deux matches où on pourrait faire 26000 ou 27000 spectateurs. En revanche, on n’envisage de ne payer aucun loyer car nous reversons déjà 2% de nos recettes billetterie à la mairie, alors que nous sommes le club du Top 14 le moins soutenu par les collectivités locales. Or nous avons provoqué la saison dernière 95 millions d’euros de retombées économiques, et ce chiffre pourrait s’élever cette année à 120 ou 130 millions grâce à la Champions Cup (la coupe d’Europe, NDLR). C’est largement suffisant pour ne pas demander de loyer supplémentaire. »
Qui paye son billet ?
L’UBB s’acquitte actuellement de 80000 à 100000 euros par saison, ce qui « couvre à peine les frais de nettoyage après les matches », glisse-t-on à la Ville, où l’on votera prochainement en conseil municipal d’une possible augmentation de ce prélèvement de 2%. Car, en outre, dans le nouveau Chaban, le club bénéficiera pour son public VIP de loges supplémentaires (237 places) et d’un espace de réception de 1200 m2 en haut d’un virage, capable d’accueillir 2000 personnes.
« Actuellement nos invités et partenaires sont dispersés entre 4 ou 5 lieux différents entre les matches, dont le gymnase Albert-Thomas, et dans des espaces de qualités inégales, poursuit Laurent Marti. Cela devient un vrai souci. Là, nous aurons un fabuleux espace avec vue sur le terrain, dans un lieu magique en plein centre-ville, qui pourra avoir d’autres utilisations que sportive. »
Or les partenariats représentent 38% des recettes de l’UBB, et la billetterie seulement 30%. Mais, précise aussitôt Laurent Marti, si le nouveau stade Chaban permettra de recevoir convenablement les partenaires, il n’entraînera pas de retombées financières immédiates.
Adjointe au maire en charge des sports, Arielle Piazza voit un autre intérêt pour les 25 associations sportives qui fréquentent les lieux : leurs licenciés ne seront pas obligés de faire place nette les vendredi après-midi lorsque l’UBB joue à Chaban, afin de préparer les espaces de réception. Elle souligne au passage que le Parc Lescure bénéficiera d’un gymnase et de terrains de sport modernisés.
Entre les riverains et la Ville, entre le club résident et le futur exploitant du stade, les négociations s’annoncent encore âpres. Deux comités de pilotage du projet, qui associent notamment tous les partis politiques et des représentants des associations, doivent encore se tenir d’ici le 15 mai. Des ateliers thématiques pilotés par les adjoints concernés, vont également se mettre en place sur trois sujets: les commerces, la préservation du patrimoine et les sports. Il va y avoir du sport.
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