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Pessac bannit les cirques avec animaux sauvages

Depuis le mois d’octobre, les cirques avec animaux sauvages sont interdits de séjour à Pessac. Cette décision, également prise par 45 autres communes françaises, relance le débat sur les conditions de vie des animaux en captivité.

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Pessac bannit les cirques avec animaux sauvages


Les éléphants, chameaux, tigres et autres animaux non domestiques ne pourront plus faire leur show à Pessac. Et pour cause, la mairie a pris en octobre dernier un arrêté interdisant aux cirques avec animaux sauvages de s’installer dans la commune. Pessac est la première commune de Gironde et la troisième en Nouvelle-Aquitaine, avec Lescar (Pyrénées-Atlantique) et Rilhac-Rancon (Haute-Vienne) à se positionner ainsi cette année.

« Depuis quelques temps, nous recevions de plus en plus de courriers de nos administrés se plaignant de voir des animaux, un peu faméliques, attachés en plein soleil, sans beaucoup à boire, dans le parc Pompidou (où les cirques sont accueillis, NDLR), explique le directeur de cabinet du maire, Marc Muret. Comme le maire, Franck Raynal a une vraie sensibilité à la cause animale (il a notamment pris position via des tweets contre les méthodes utilisées dans les abattoirs révélées par l’association L214, NDLR), que nous constations de menues dégradations dans ce parc suite aux passages de cirques, avec par exemple, des animaux qui mangeaient l’écorce des arbres, et que faute de place nous n’accueillions que de petits cirques pour une fréquentation jamais bien importante, nous avons pris cet arrêté ».

Une décision que l’association Acta Gironde, qui milite contre la torture des animaux, a salué d’un « Victoire ! » éloquent. Du côté de l’association Code animal, qui milite contre l’exploitation des animaux et mène des campagnes contre les cirques avec animaux auprès des communes, même son de cloche : c’est un pas en avant dans un mouvement encore très minoritaire, mais en pleine accélération.

Un lion du cirque Pinder (DR)
Un lion du cirque Pinder (DR)

Des cirques bannis de 46 communes

En effet, rien qu’en 2016, 29 communes ont ainsi rejoint les rangs des villes s’inscrivant dans une telle démarche de protection des animaux sauvages, et dont le nombre s’élève désormais à 46. Une preuve que les arguments contre la vie en cage sous les chapiteaux rencontrent de plus en plus de partisans.

« L’animal dans un cirque est contraint de survivre dans un milieu parfaitement inadapté à sa nature, peut-on lire sur le site de Code Animal. L’exiguïté des cages, l’impossibilité de fuir, de former un groupe social équilibré et de développer une panoplie de comportements propres à son espèce, sont autant de facteurs de souffrances (…) A cette captivité forcée, s’ajoute la soumission à un dressage, le plus souvent violent, qui, en tout état de cause, nie la nature de l’animal ».

Pour autant, la décision prise par la ville de Pessac ne doit pas être prise comme un blanc seing aux défenseurs de la cause animale.

« Attention, notre arrêté n’a pas été motivé par une opposition farouche et éthique aux cirques avec animaux sauvages, tient à préciser Marc Muret. Il existe des cirques avec des ménageries dignes de ce nom où les animaux sont bien soignés. C’est davantage une mesure de police et de maintien de l’ordre dans l’espace public ».

Des arrêtés illégaux ?

En d’autres termes, si la ville de Pessac avait pu accueillir les cirques Pinder ou Gruss, elle n’aurait pas pris un tel arrêté. Et la question peut se poser pour d’autres villes interdisant les cirques avec animaux sauvages car il s’agit pour les deux tiers de communes de moins de 20000 habitants…

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Ce paradoxe rend d’autant plus amer les circassiens.

« Les extrémistes de la cause animale se réjouissent, mais ce n’est pas une victoire, proteste Solovich Dumas, le porte parole de l’Association des Cirques de famille de France qui regroupe environ 250 structures transmises de père en fils depuis des générations. Les communes qui prennent de tels arrêtés avancent comme arguments les mauvais traitements que nous ferions subir à nos bêtes, mais elles oublient que notre profession est très réglementée. Chaque directeur de cirque, en vertu de l’arrêté du 18 mars 2011 (fixant les conditions de détention et d’utilisation des animaux vivants d’espèces non domestiques dans les établissements de spectacles itinérants, NDLR) doit posséder un certificat de capacité pour la possession d’animaux et doit se mettre en règles avec les services vétérinaires. Nous recevons également des visites de la Direction départementale de la protection des populations (DDPP) qui peut, par exemple, vérifier si nos cages sont conformes. Bref, nous sommes très contrôlés et j’estime donc que ces arrêtés sont illégaux ».

Les Cirques de famille de France ont d’ailleurs saisi la préfecture de la Gironde afin qu’elle vérifie la légalité de la décision prise par la ville de Pessac.

Arts forains et charte fourre-tout

Il en va, selon Solovich Dumas, de l’avenir de la profession. Déjà en mars dernier, son association avait organisé une opération escargot sur le périphérique parisien et sur la Francilienne, puis une manifestation dans la capitale, afin de tirer la sonnette d’alarme :

«On ne peut plus travailler ! Sur 550 petits cirques, 70 % ont de grosses difficultés parce qu’ils ne trouvent pas de terrain où s’implanter. Par peur des polémiques, les collectivités cèdent aux pressions des associations de défense des animaux et de plus en plus d’entre elles refusent que nos cirques s’installent sur leur territoire, qu’elles aient pris l’arrêté en question ou non. »

Le Ministère de la Culture a d’ailleurs répondu cet été aux inquiétudes de ces circassiens en engageant avec eux un dialogue qui a abouti en septembre à la signature de la Charte d’objectifs Culture – Gens du voyage et Tsiganes de France. Un texte un peu fourre-tout qui préconise de valoriser et protéger les arts forains et circassiens.

Pour autant, la balle reste dans le camp des communes. Dans une lettre datée du 30 juin 2016, le ministre de l’intérieur, Bernard Cazeneuve, le rappelait déjà à Gérard Lemaire, le délégué interministériel en charge des questions relatives aux forains  :

«La compétence des maires comme le principe de libre administration des collectivités territoriales impliquent que l’État n’est pas en capacité d’imposer aux communes une quelconque obligation d’accueil.»

Et jusqu’à présent à chaque fois que les circassiens sont montés au créneau pour demander l’annulation d’un arrêté interdisant les cirques avec animaux sauvages, ils sont resté sur la touche.

« A notre connaissance, il n’y a pas eu de retraits des arrêtés suite aux attaques menées contre leur mise en place, explique Franck Schrafstetter, de l’association Code animal. Même chose dans d’autres pays en Europe, toutes les tentatives ont échouées » (lire notre encadré).

Liberté d’entreprendre

A la Ciotat, dans les Bouches-du-Rhône, le maire, Patrick Boré (LR) avait ainsi pris un arrêté contre les cirques avec animaux sauvages en mars dernier. Saisie dans la foulée par le Syndicat national du cirque, la préfecture, estimant qu’une telle décision « paraissait illégale au fond et en la forme », a alors demandé à la ville de retirer l’arrêté.

Résultat : la mairie de la Ciotat a pris acte de la décision du préfet mais n’a pas levé l’arrêté, considérant qu’il revient aux pouvoirs de la commune « d’autoriser ou pas la venue d’un cirque. »

Pour ce qui concerne Bordeaux, Pinder, Gruss et leurs confrères, comme leurs inconditionnels, n’ont pas de souci à se faire. Interrogé par Rue89 Bordeaux, Jean-Louis David, l’adjoint à la vie locale, précise que la mairie ne se range pas du côté de Pessac :

 « En ce qui nous concerne, nous ne prendrons pas ce genre d’arrêté car nous estimons que les dispositifs de contrôle imposés par les préfectures sont suffisants. De plus, notre service hygiène et salubrité vérifie que les règles en vigueur sont respectées. Et puis interdire les cirques serait contraire à la liberté d’entreprendre.»

Une liberté qui rapporte quelques euros à la mairie : en moyenne, les cirques comme Pinder et Gruss, en occupant les 5000 m2 des Quinconces, versent une taxe d’occupation du domaine public qui s’élève à 1000 euros par jour, soit quelques dizaines de milliers d’euros par an dans les caisses de la Ville.


#ACTA Gironde

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