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Comment le campus de Bordeaux veut éradiquer le harcèlement de rue

Sur le campus universitaire de Pessac-Talence-Gradignan, le sentiment d’insécurité prévaut chez beaucoup d’étudiantes, avec des faits allant jusqu’à l’agression. Alors que le projet de loi contre le harcèlement sexuel vient d’être présenté, un certain nombres d’actions sont menées pour inverser la tendance.

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Comment le campus de Bordeaux veut éradiquer le harcèlement de rue

Marlène Schiappa, secrétaire d’Etat chargée de l’égalité entre les femmes et les hommes, présentait ce mercredi au Conseil des ministres son projet de loi contre les violences sexuelles et sexistes. Allongement des délais de prescription pour crime sexuel sur mineur, âge minimum pour une relation mineur-majeur ou bien verbalisation de l’outrage sexiste sont au programme.

Investies dans une lutte contre le harcèlement et les agressions sexuelles, les universités bordelaises se sont saisies de ce problème face à l’insécurité dont se sentent victimes les étudiantes.

Le sujet est régulièrement débattu. Jeudi 8 mars dernier par exemple, l’Université Bordeaux Montaigne tenait une conférence sur la verbalisation du harcèlement de rue. Les chargés de mission à l’égalité entre les femmes et les hommes, Marion Paoletti (Université de Bordeaux) et Yves Raibaud (Université Bordeaux Montaigne), ont animé cette rencontre.

« Certains expliquent que verbaliser est infaisable, expliquait Yves Raibaud. C’est tout le contraire. Il suffit de se renseigner et de localiser les zones d’intervention et de surveillance. Verbaliser, c’est prendre quelqu’un en flagrant délit, donc il est impossible pour la personne de se dédouaner. Cette solution peut permettre à mon sens de s’occuper de 90% des cas de harcèlement. C’est souple, rapide et dissuasif. »

Se renseigner et localiser les zones d’intervention : l’Opération Campus, en charge de la rénovation du patrimoine immobilier de l’université, et les « marches exploratoires » des établissements bordelais d’enseignement supérieur l’ont fait.

Des marches exploratoires qui ont du sens

Ces « marches exploratoires » ont été engagées en 2017 et des questionnaires ont aussi circulé en ligne. Le but de ces deux actions était de recueillir des témoignages, des réactions et des observations sur la sécurité du campus universitaire PTG.

Au total, 5 marches ont eu lieu et 5000 personnes ont répondu aux consultations sur Internet. Le constat est amer, le campus n’inspire pas la tranquillité. En atteste un rapport détaillé des témoignages sorti en novembre 2017, qui font pour certains froid dans le dos :

« J´ai croisé un exhibitionniste aux abords du Village 1. Ceci m´a particulièrement traumatisée et m´a poussée à changer de logement », déclare une personne sondée. « De nombreuses personnes klaxonnent les filles, j’ai déjà été suivie par des jeunes près du restaurant universitaire du Sirtaki », ajoute une autre.

Les chargés de mission à l’égalité entre les femmes et les hommes ont alors fait des propositions à Opération Campus, comme améliorer la signalisation et d’éclairage, ou réaménager les parcours et les espaces de plein air.

Certaines zones semblent très exposées au harcèlement de rue ou aux agressions sexuelles, comme la « galerie Montaigne », les logements étudiants Émile Durkheim ou encore l’arrêt de bus Montaigne-Montesquieu (lignes 10 et 35).

« Les zones les plus sensibles sont globalement proches des habitations, raconte Lison Herledan, ancienne responsable de l’antenne bordelaise du Collectif Stop Harcèlement de Rue. Depuis le tram, il y a par exemple une grande partie boisée à faire à pied et dans le noir pour rejoindre le Village 5 du Crous. Le tunnel ouvert de l’esplanade Université Montaigne (Galerie Montaigne, NDLR) et le parking proche de l’arrêt de bus sont aussi déserts. Les derniers trams en direction de Pessac sont presque vides, ce qui fait que beaucoup de personnes sont suivies jusqu’à chez elles ».

Un espace public à réaménager

Selon Lison Herledan, il est nécessaire de repenser l’espace public du campus :

« Le principal problème est le manque d’éclairage, les parties boisées non-aménagées, mais surtout le côté ‘dortoir’ du campus. Personne ne circule, donc en cas de problème il n’y a personne vers qui se tourner. Je pense que s’il y avait au minimum un bar ouvert ou un lieu culturel mieux situé que la Maison d’Activité Culturelle (MAC), ce serait plus sécurisant ».

Transformer les espaces publics est une des responsabilités de l’Opération Campus. Eric Genay, directeur du projet, fait un point sur l’avancée des travaux :

« Les marches exploratoires sont un outil complémentaire concret, pertinent et qui complète le travail que nous allons faire avec les urbanistes. Cela permet de manière originale de trouver des pistes de réflexion et des solutions. Dans le cadre de notre élaboration de programme (encore en cours NDLR), cela attire notre regard sur certains points. »

Les travaux d’aménagement de l’extérieur du campus Pessac-Talence-Gradignan débuteront seulement en 2021, à la fin des rénovations immobilières, pour une fin du chantier courant 2022.

« En attendant, nous faisons tout de même des améliorations comme proposer des cheminements éclairés et mieux adaptés sur certaines zones » précise Eric Genay.

Le trajet boisé entre l’avenue Schweitzer et le campus SHS Pessac bénéficie par exemple depuis septembre 2017 d’une voie d’accès retravaillée. Un chemin cimenté a ainsi été mis en place. Il en est de même pour la liaison entre la bibliothèque universitaire de Droit et Lettres et l’arrêt de tram Unitec.

Arrêt à la demande

Aménager une zone piétonne sur le secteur François Bordes, favoriser l’accès au Village 5 depuis l’Esplanade des Antilles et créer un quartier mutualiste à Pessac font partie des prochaines étapes.

Une autre initiative est à mettre au compte de Transports Bordeaux Métropole (TBM). Depuis novembre, TBM teste un dispositif d’arrêt à la demande de ses bus. La ligne 10, présente sur le campus universitaire fait partie de l’expérimentation. A partir de 22h, un chauffeur de bus a la possibilité de prendre ou déposer un voyageur entre deux arrêts. L’objectif est de limiter les déplacements piétons dangereux et le harcèlement dans les transports en commun.

Depuis le début de cette expérimentation, TBM a enregistré en moyenne 6 à 7 demandes par soir et par ligne. Selon Christophe Duprat, vice-président de Bordeaux Métropole en charge des transports, « les premiers résultats sont concluants sur les lianes 7 et 10, l’objectif est de l’étendre à l’ensemble des lianes qui circulent après 22h ».


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