Il n’y a pas que les « gilets jaunes » qui ont envie de s’exprimer. Ce vendredi soir, le premier rendez-vous du « grand débat » organisé dans l’agglomération a réuni plus de 400 personnes à l’Athénée municipal. Malgré le cadrage très strict des discussions et l’absence de chasubles fluo, les prises de paroles ont été riches. Avec une demande forte : plus de services publics, plus clairs et plus accessibles.
« Si on est là ce soir c’est parce que le peuple se pose des questions, que le peuple a envie d’être acteur. Ce n’est pas grâce au gouvernement. »
Le « peuple » présent ce vendredi soir à l’Athénée municipal de Bordeaux a pourtant peu de ressemblances avec le « peuple » des ronds-points occupés et des manifestations du samedi après-midi. La faute au lieu et à l’heure (un vendredi soir en centre ville) ? Aux barrages de CRS contrôlant tout le monde à l’entrée des rues alentours ? Ou à l’essence même de cet évènement, décidé par Emmanuel Macron et dont beaucoup de Gilets jaunes se méfient ?
Assiettes
En tous les cas, aucun des participants à ce « débat » ne porte de gilet fluo, et beaucoup des cheveux blancs. Au micro, quelques uns se revendiquent bien de ce mouvement, tentant de faire entendre leur voix.
« Une partie de la population est dans la rue depuis des mois, c’est l’expression d’une souffrance, estime un homme. Mais ici on n’est pas dans le débat essentiel. Le grand débat, c’est comme si vous mettiez autour de la table des gens qui ont l’assiette bien remplie, et d’autres qui ont l’assiette vide. Les premiers expliquent avec beaucoup de pédagogie aux seconds pourquoi ils ont l’assiette vide et pourquoi ils n’ont que des miettes. »
Si tout le monde peut bien s’exprimer, chacun est interrompu par le modérateur souhaitant à tout prix voir émerger « une proposition s’il vous plait », et menaçant une fois de faire couper un micro.
« Nuit Debout en moins structuré »
Car telle est la règle du jeu : faire des propositions concrètes sur les thèmes du jour, l’organisation administrative de l’État, et les services publics. Avec concision, et en agitant des petits cartons de couleurs verte, orange ou rouge pour réagir aux autres prises de paroles. Le tout orchestré par des membres du Comité de développement durable (C2D) de Bordeaux Métropole.
« Cela ressemble beaucoup aux assemblées de Nuit debout, mais avec moins de structuration » compare une jeune femme à l’issue de la soirée.
« On a envie d’intervenir sur plein de sujets, et pas seulement quand le gouvernement nous le demande », revendique une autre au cours du débat.
Des voix hors cadre, il y en a eu très peu. Comme cette mère d’une enfant autiste, parlant pour « tous les enfants qui ont des troubles du développement : c’est facile d’être derrière un bureau, mais venez à la maison et vous verrez que c’est pas facile ». Elle interpelle même la secrétaire d’État Christelle Dubos, qui assiste à la réunion :
« Et le handicap, vous n’en parlez pas ? Vous êtes ministre mince quand même ! »
Système moyennement représentatif
Ou encore :
« Si j’ai bien compris, ce grand débat a pour but de traiter les effets de cette crise, et pas la cause. La cause, c’est ce système représentatif qui ne l’est pas tellement. »
Une quarantaine de prises de parole joue le jeu et respecte le timing.
« Je me réjouis de la qualité de ce débat. C’est un bel exemple de débat démocratique » peut se féliciter le maire Alain Juppé en conclusion.
Dans la salle, des personnes majoritairement retraitées, et plutôt aisées. Des non-gilets jaunes, venus là par curiosité ou pour profiter de l’ouverture de la parole déclenchée par le mouvement social.
Et si ces gens-là sont parfois peu renseignés – « Est-il vrai que toute personne en France a droit à 1780€ par mois au minimum ? » demande une dame –, ils ont aussi des choses à dire. Sur les services publics :
« Améliorer les services publics, cela passe par des moyens. Je ne vois pas comment on peut l’envisager avec une suppression de 120 000 fonctionnaires prévue dans les années à venir », rappelle un homme au micro.
Premiers services
D’autres évoquent la « galère » que sont devenus les services publics au quotidien : « On ne sait plus à qui s’adresser », les problèmes d’horaires, l’obligation de passer par internet… « On veut des gens derrière des guichets » réclame une intervenante, avant qu’une autre ne demande « d’éliminer les standards téléphoniques : tapez 1, tapez 2, tapez 3… Mettez des hôtesses qui orientent les gens ! »
D’autres personnes témoignent de la situation dans les crèches (de plus en plus privées et où l’enfant est « marchandisé »), les écoles (aux effectifs par classe trop importants, et aux profs mal payés), les hôpitaux (où le personnel est exploité), pour les personnes en situation de handicap (démunies face à des démarches trop complexes), du manque de prise en charge des soins psychologiques, ou encore de l’environnement (que les institutions publiques ne protègent pas).
La logique de rentabilité est pointée du doigt, certains veulent « remettre l’économie au service des hommes », d’autres rétablir l’ISF (car « cet argent ne ruissellera pas, il est déjà parti dans les paradis fiscaux » selon un homme qui se présente comme cadre de banque).
Évoquée à plusieurs reprise, c’est l’idée d’un guichet unique pour les démarches qui s’impose largement :
« La plupart des gens ne connaissent pas leurs droits et ne les réclament pas parce qu’ils ne sont pas informés. Est-ce qu’il est possible d’avoir un guichet unique, ou à la CAF, ou aux impôts, ou en mairie ? C’est indispensable. »
Même horizon
Il est aussi beaucoup question de « rapprocher les décideurs des citoyens ». « Il faut remettre des services publics dans les chefs-lieux de canton, redonner du pouvoir aux communes qui sont en lien direct avec les citoyens », estime une participante.
« C’est vraiment super ce qu’on fait là, discuter, la démocratie. Je voulais savoir si on ne pouvait pas inventer un nouveau service public qui serait une assemblée, comme ce soir, où l’on aurait vraiment un pouvoir exécutif, législatif, pourquoi pas constitutionnel ? » demande naïvement un homme dans la salle.

Alain Juppé (ici à côté de Christelle Dubos) a introduit la soirée puis assisté aux discussions sans y prendre part (BG/Rue89 Bordeaux)
En fin de compte, peu de débats contradictoires, les prises de parole tendant globalement toutes vers un même horizon. À la sortie, beaucoup de participants (qui ne se disent pas « gilet jaune ») sont satisfaits de la soirée. Certains comptent « attendre de voir ce que cela va donner ». D’autres au contraire, considèrent que cela ne « sert à rien » car « la démocratie c’est dans la rue ». Ils n’ont pourtant rien de violents casseurs.
Prochains rendez-vous dans l’agglomération : jeudi 7 février à 18h30 au Carré des Jalles de Saint-Médard-en-Jalles, sur le thème « fiscalités et dépenses publiques », samedi 23 février à 14h30 à la salle polyvalente de Carbon-Blanc, « démocratie et citoyenneté », et mardi 5 mars à 18h30 à l’espace Mauriac de Talence, « transition écologique ».
Christelle Dubos a voté contre l’interdiction du glyphosate et donc permet à cette saloperie de continuer à empoisonner la population. Bon d'accord cela va lui permettre d'avoir du boulot car comme le dit une personne de l'assistance : « Et le handicap, vous n’en parlez pas ? Vous êtes ministre mince quand même ! »
Et pour ne pas perdre son temps avec les responsables de la situation, allez plutôt sur le site du : https://le-vrai-debat.fr/
https://www.youtube.com/watch?time_continue=29&v=ka4jDmu3Ahc
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