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Pourquoi garer son vélo à la gare de Bordeaux est devenu gavé galère

La SNCF a retiré les arceaux vélos sur le parvis de la gare Saint-Jean pour y installer des commerces. Les élus de Bordeaux Métropole et les usagers protestent.

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Pourquoi garer son vélo à la gare de Bordeaux est devenu gavé galère

Autour de la gare Saint-Jean à Bordeaux, les tas de vélos empilés sur le mobilier urbain font désormais partie du décor. Sur le parvis, autour de l’arrêt de bus, le ballet des cyclistes tournant de longues minutes à la recherche d’une précieuse place libre sur un des arceaux est incessant.

Quant aux petites grilles fixées aux murs de la gare, un panneau d’interdiction représentant un vélo barré rappelle un arrêté préfectoral de 2014. Beaucoup se reportent alors sur les barrières qui protègent les espaces piétons de la circulation automobile ou encore sur les grilles des rampes d’accès du parkings.

Tout vélo sera systématiquement enlevé signale un de ces panneaux accroché aux défenses situées sur les murs du hall 1 de la gare (EB/Rue89 Bordeaux)

A la gare, à la fac : situation « critique »

« Je fais ma muscu… ! » plaisante Anna, vélo à bout de bras.

Son antivol rouge coincé entre les dents, sac à main entre les pieds, elle tente de le poser sur le muret soutenant les grilles de la rampe d’accès du parking de la gare. Travailleuse sociale dans le quartier, elle fréquente les commerces du hall quotidiennement.

« La boulangerie, la presse, c’est pratique mais pour les vélos, c’est l’enfer… Et c’est comme ça tous les jours », glisse-t-elle dans un demi-sourire.

Ces difficultés à stationner, elle les rencontre à la gare comme sur le campus de Talence ce qui conduit parfois la trentenaire à changer ses habitudes ou à reporter ses achats.

Entre arceaux et barrières, se stationner à vélo près de la gare relève du parcours du combattant (EB/Rue89 Bordeaux)

« C’est critique », confirme Ludovic Fouché, directeur de l’association Vélocité, dont la plateforme en ligne Cyclo-fiche permet aux cyclistes de signaler un problème d’aménagement ou de circulation sur leurs trajets.

« A Strasbourg, il y a 2000 places de stationnement vélo près de la gare qui réalise la moitié du trafic passager de la gare Saint-Jean ».

L’association a donc interpellé la mairie de quartier afin de l’alerter de la situation.

A la recherche des arceaux perdus

Michel Duchène, vice président à l’urbanisme à Bordeaux Métropole dénonce également la disparition des arceaux. Il met en cause la responsabilité de la SNCF dans une tribune intitulée « La gare de Bordeaux exclut les vélos », postée sur Facebook le 22 août dernier.

Bordeaux Métropole avait en effet installé des arceaux bleus sur l’esplanade Louis-Armant lors de sa réfection en 2010. Situées sur une emprise foncière appartenant à la SNCF, plusieurs centaines de places vélo ont disparu lors des travaux de réfection du hall des départs de la gare puis ont laissé place à des kiosques commerciaux, dont celui d’une célèbre chaîne de cannelés.

« Ils ont demandés à ce qu’ils soient retirés, poursuit l’élu. Les dirigeants de la SNCF à Bordeaux n’ont qu’un objectif, c’est faire de l’argent. Ce qui s’entend mais c’est une erreur de le faire au détriment du vélo et du mobilier urbain. »

Pierre Longeaux, directeur adjoint de la gare Bordeaux Saint-Jean, s’en défend. Contacté par Rue89 Bordeaux, il assure que les arceaux ont été enlevés suite à un arrêté préfectoral lors des travaux de rénovation des parvis en 2017. Le stationnement « anarchique » des vélos sur l’esplanade entraînerait des soucis de circulation et un problème de sécurité, notamment pour l’accessibilité de la gare aux services de secours dans un contexte post-attentats.

Si elle nous confirme l’arrêté de 2014 relatif à l’interdiction d’attacher des vélos aux défenses près des portes, à ce stade, la préfecture n’a pas été en mesure de nous confirmer (ni d’infirmer) l’existence d’un autre texte relatif au stationnement des bicyclettes sur le parvis.

« Il n’est pas prévu que les arceaux soient réinstallés ailleurs, poursuit Pierre Longeaux. Il y a déjà 700 places réparties sur 2 parcs vélo. »

Le premier facilement repérable grâce à sa façade en béton orange et plaques de verre est situé devant la gare, sur le parvis Charles-Domercq, depuis 2010. Le second parking a été créé par la SNCF dans le cadre de la maitrise d’œuvre du nouveau hall de la gare, côté Belcier et mis en service durant l’été 2018.

Le dirigeant précise cependant que « cette mission ne relève pas de la responsabilité de la SNCF Gares & Connexions ».

Le coût de la place

A Bordeaux, les deux parcs vélos de la gare sont en effet gérés par TBM. Selon les données transmises par Bordeaux Métropole, ils affichent une capacité totale exacte de 691 places pour… 804 abonnés fin juillet !

Ainsi, avec une moyenne de 4300 passages mensuels, le parking vélo du parvis Charles-Domercq est à un taux de remplissage proche de la saturation. Celui côté Belcier, qui reçoit en moyenne de 800 visiteurs mois, progresse en fréquentation mais reste sous-exploité.

Jusqu’en 2017 plusieurs dizaines de places de stationnement vélo sur arceaux étaient disponible à l’entrée de la gare. (DR)

« Pourquoi investir autant d’argent dans un dispositif non adapté aux besoins des cyclistes et repoussé au loin ? » interroge Michel Duchene. Une interrogation partagée par le directeur de Vélocité. Et s’il loue la qualité des aménagements du récent parking, Ludovic Fouché en pointe aussi les limites :

« Contrairement au parking voitures, on ne peut pas accéder directement à la gare depuis le parc vélo de Belcier, ce qui entraine une perte de temps non négligeable. »

De plus, ces parkings fonctionnement sur abonnement et s’adressent uniquement aux utilisateurs réguliers. « Il faut des parkings publics, gratuits et plus faciles d’accès », conclut il.

Un kiosque de la plus célèbre marque de cannelés bordelais est installé sur l’emprise où se trouvaient une partie des arceaux (EB/Rue89 Bordeaux)

Une situation sur laquelle Patrick Bobet, président de Bordeaux métropole se veut rassurant :

« Nous ne sommes pas dans une politique de diminution du nombre de places, bien au contraire. »

Objectif 3000 places

Dans le cadre du Plan d’urgence mobilité de Bordeaux Métropole, un objectif de création de 3000 places de stationnement vélo par an était fixé.

« Toutes les places de stationnement vélo qui ont été enlevées devant la gare seront réinstallées au plus près et probablement même en nombre plus important. Reste à savoir où. »

Le problème n’a rien d’anecdotique. Le vélo est en effet le mode de déplacement principal de près d’un Bordelais sur cinq. En quatre ans, il aurait bondi de 50% selon les mesures effectuées par Bordeaux Métropole.

Mais si l’augmentation de l’utilisation de ce mode de déplacement sur la métropole a tout pour réjouir, les infrastructures de stationnement peinent à suivre, alors que la crainte de se faire voler son biclou est l’un des obstacles à l’explosion de la pratique.


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