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Contre la loi Sécurité globale, 4000 manifestants et teufeurs bordelais

Des centaines de manifestants ont répondu à l’appel des organisations et des syndicats, mais aussi des milliers de teufeurs, venus soutenir les personnes interpellées lors de la rave de Lieuron (Bretagne), notamment Tristan, détenu comme l’un des organisateurs présumés.

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Contre la loi Sécurité globale, 4000 manifestants et teufeurs bordelais

« C’est qui Tristan ? » demandait une manifestante venue à 13h45 place des Quinconces à la vue de certaines pancartes. A cette heure-là, un premier groupe de quelques 400 personnes avait rapidement planté un décor de free party. Un autre manifestant, drapeau syndicaliste posé sur l’épaule, répondait : « Je ne sais pas qui est Tristan mais je trouve qu’il y a beaucoup de jeunes. »

Des jeunes oui, ça se voit et ça s’entend. Le jack audio a vite fait passer la sono de la Ligue des droits de l’homme (LDH) de « On lâche rien » de HK et Les Saltimbanks à une techno niveau 150 bpm. Ceux qui n’étaient pas prévenus ont échangé quelques regards perplexes avant que Jean-Paul Guicheney, délégué régional LDH, prenne le micro.

Ce samedi, le rendez-vous été donné en bas de la place des Quiconces Photo : WS/Rue89 Bordeaux

14 h30

« Salut Bordooooooo ! Vous êtes chauds ? » Jean-Paul Guicheney reçoit en retour des applaudissements et entame son discours :

« Le Gouvernement et une majorité de parlementaires s’acharnent à vouloir imposer une vision de plus en plus autoritaire, de plus en plus sécuritaire de l’État de droit, arguant des agissements condamnables de quelques-uns pour faire de tous les citoyens des suspects en puissance ! »

De quoi rappeler que ce samedi 16 janvier, Bordeaux répond à un appel national avec 80 rassemblements annoncés partout en France contre la loi Sécurité Globale. 

« Cette loi sécuritaire, la 31e en 30 ans, la 7e sur la sécurité et le terrorisme en 8 ans, s’ajoute à une série suffocante de mesures qui n’ont fait qu’accroître la surveillance et rogner sur les libertés » tonne le délégué avant de faire allusion au « Discours de la servitude volontaire » d’Etienne de La Boétie :

« L’on ne peut tenir aucun être en servitude sans faire tort à sa liberté. Nous sommes nés avec la liberté et avec la passion de la défendre » ajoute Jean-Paul Guicheney.

Il promet pour finir « manifester autant qu’il le faudra » avec un rendez-vous déjà inscrit autour du 30 janvier.

Porte Cailhau : les entrées du centre-ville fermées par les forces de l’ordre Photo : WS/Rue89 Bordeaux

15h

Sur les quais, les foules s’émoustillent avec l’arrivée des premiers sound system mobiles. Des grappes de jeunes s’alignent derrière chaque pile de caissons de son. Le cortège se met en route. En tête, les représentations syndicales suivies non pas d’un, ou de deux… mais de cinq, voire six piles de son si on compte, en plus des camions, les systèmes à roulettes. On monte d’un cran : 170 à 200 bpm à certains niveaux hardcore.

Très vite, le défilé s’étoffe jusqu’à s’étaler sur plusieurs centaines de mètres. 3000 à 4000 personnes longent le quai Richelieu en passant devant les entrées du centre-ville gardées par les forces de l’ordre : rue Esprit-des-Lois, place de la Bourse, place du Palais. Le cortège s’engage dans le cours Victor-Hugo.

« Les Mains rouges » Photo : WS/Rue89 Bordeaux

15h40

Face à face au coin du cours Victor-Hugo et cours Pasteur.

Les membres d’un collectif qui porte le nom de « Les Mains rouges » pour dénoncer les violences policières se positionnent face au barrage des forces de l’ordre. Les mains (rouges) en l’air, une pancarte « BaiSSe ta matraquEUe », un fumigène, un drapeau arc-en-ciel et la lecture d’un texte aux passages accusateurs et d’autres revendicateurs. En 5 minutes top chrono.

16h

Place de la République. L’ambiance « teuf » prend toute sa dimension et, face à quelques centaines de manifestants – syndiqués, associatifs, Gilets jaunes –, des milliers de teufeurs. Sur twitter, un commentaire : « Comment ringardiser les syndicats en une seule manif. Bravo les teufeurs. »

Jean-Paul Guicheney commente :

« C’est eux qui sont les plus concernés par l’avenir. Ils sont nombreux à nous contacter pour demander des conseils ou de l’aide. Les jeunes ne sont pas dupes. »

Dans la foule, on parle de « contexte tellement anxiogène que les jeunes ont envie de se lâcher ». « Que la jeunesse se lève » crie-t-on dans le micro. Antoine Boudinet, conseiller municipal Bordeaux en lutte, et un des très rares élus présents, ajoute :

« L’envie est à la fête et ça permet d’impliquer des jeunes. L’année commence avec une mobilisation festive et c’est une bonne chose. »

Jérémy, un des organisateurs de ce « Soutien à la maskarade » à la tête d’un sound system où on peut lire « All Cultures Are Beautiful » (les initiales d’ACAB, acronyme de l’anglais « All Cops Are Bastards » = « Tous les flics sont des salauds »), explique :

« Toute la France se révolte aujourd’hui. On met Tristan en prison pour avoir organisé une fête et, pour bien plus grave que ça, des criminels sont laissés en liberté. On pose des basses, on ne pose pas des bombes. Et les personnes qui sont là sont des personnes qui cherchent un moment de liberté. »

A noter : un moment de liberté majoritairement affranchi de tout geste barrière.

Rue Sainte-Catherine, les gestes barrières avant le couvre-feu Photo : WS/Rue89 Bordeaux

17h

Alors que sur le trottoir en face, Denis, Gilet jaune venu avec une centaine de ses camarades, trouve « bien que tout le monde s’y mette », la fête annonce sa fin. Les basses se taisent et les annonces d’iPhone perdus se succèdent avant la consigne ultime : « N’oubliez pas de ramasser vos déchets et de rentrer chez vous avant 18h. »

Ce n’est pas ce que feront une cinquantaine de jeunes. Le groupe redescend le cours Victor-Hugo en chantant « Tout le monde déteste la police » et essaie de s’engager dans la rue Sainte-Catherine. Les forces de l’ordre les accueillent avec les matraques et les lacrymos. Pas de blessés et pas d’interpellations. Ce sera le mot de la fin avant le premier couvre-feu (plus ou moins respecté) version 18h.


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