« Ce sont des enfants qui sont tous scolarisés, ils ont besoin de stabilité », tonne Rachid Belhamri, président du collectif La Piraterie, qui accompagne les familles occupant l’ancienne gare de la Médoquine à Talence. La SNCF Gare et Connexions, propriétaire du bâtiment, a effectué une requête en référé auprès du tribunal administratif de Bordeaux en octobre dernier.
La réouverture de la gare, qui n’est plus desservie depuis 1949, pourrait intervenir d’ici 2025. Dans le cadre du projet de RER métropolitain, des travaux de rénovation doivent être effectués pour installer une base vie pour l’entreprise de service public. L’ancienne gare est destinée à devenir un pôle d’échanges multimodal de transports, pouvant accueillir jusqu’à « 4 500 voyageurs par jour ».
« Où est l’urgence ? »
Ici vivent des familles exilées d’Algérie, du Cameroun, du Niger ou d’Albanie. Ces dernières ont des titres de séjour ou sont en demande d’asile. L’électricité, l’eau et des sanitaires ont été installés. Inoccupé depuis une dizaine d’années, le bâtiment a d’abord été investi par des hommes isolés lors du mouvement des Gilets jaunes, en 2018.
« Ce ne sont pas les murs qui nous intéressent, mais les gens qui sont dedans », avance Rachid Belhamri :
« Il n’y a eu aucune tentative de conciliation. Ça fait des années que le lieu est abandonné. Où est l’urgence ? Les enfants qui vivent ici sont tous scolarisés. Ils ont des droits, dont le droit au logement. Certains ont dû dormir dans des voitures. Nous sommes en plein hiver. Ce que je demande, c’est juste du temps pour reloger les familles. »
Intégration
Ce soir-là, au moment de préparer le repas, les traits sont tirés à l’annonce de l’expulsion. Yasmine*, originaire d’Algérie, souhaite « s’intégrer », prend régulièrement des cours de français. Elle a dû subir une opération du cœur à l’hôpital Haut-Lévêque. Sans attache familiale en France, elle craint de ne se retrouver à la rue avec sa fille, âgée d’une dizaine d’années, qui présente elle aussi des problèmes de santé.
Certaines familles sont passées par d’anciens squats de la métropole bordelaise, à l’instar de la Zone Libre à Cenon, ou du Petit Carreau dans le quartier Saint-Michel, expulsé cet été. C’est le cas de Mirela*, originaire de Tirana en Albanie. Son fils, scolarisé en classe de sixième, qui traduit ses propos, nous explique qu’elle attend le renouvellement de sa carte de séjour.
Concours de la force publique
La SNCF avance notamment l’argument de la sécurité du lieu, face aux « accès direct aux voies où circulent les trains et aux lignes électriques », jugeant que « l’occupation porte atteinte à la salubrité publique ». La défense, elle, argue une « occupation paisible » du lieu, ce dernier ne présentant « aucun danger, les accès aux voies ferrées ayant été obstrués ».
Dans une ordonnance rendue le 25 novembre dernier, le tribunal administratif de Bordeaux enjoint aux occupants « sans droit ni titre » de libérer les lieux sans délai, « au risque qu’il y soit procédé au besoin avec le concours de la force publique ».
*Les prénoms ont été modifiés
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