Professeur de design à la retraite, Roseline Giusti signe « Atmosphériques », un recueil de textes publié par les éditions Phaéton (qui éditent, par ailleurs, l’excellente revue du même nom). Une cinquantaine de textes courts sur le temps qui passe, sur le temps qu’il fait, illustrés de photos.
Ce ne sont pas vraiment des poèmes en prose, au sens baudelairien du terme, puisque certains textes revendiquent une métrique, un rythme qui sont proches d’une poésie presque classique.
Précision du regard
De la pluie au brouillard, de la canicule à la neige, les paysages changent et change notre humeur au gré de ces variations atmosphériques. Roseline Giusti sait trouver les mots pour évoquer la violence du vent qui ravage arbres et toits :
« A ces sévices s’adjoignaient des hurlements rageurs. Têtes et cœurs au bord de l’éclatement forçaient l’esprit au calme. Supplique vaine. Las de lutter, il avait capitulé, tétanisé par ce déchaînement impérieux,vacarme d’outre-tombe. »
Et la chute, inattendue, teintée d’humour :
« Puis tout avait cessé, laissant les êtres, encore chancelants, ré-habiter leur corps. Reprendre souffle. »
Nul effet romantique, nulle envolée lyrique mais une précision du regard qui fait partager au lecteur l’émotion ressentie par Roseline Giusti. Y contribue une richesse d’adjectifs qui joue sur toute une gamme de connotations, du familier au recherché.
Formes courtes
Ce monde est habité, des silhouettes passent d’hommes et de bêtes, en quelques traits dessinées et je les reconnais au point de deviner quelle vallée pyrénéenne leur sert d’écran. J’aime l’évocation du « vieil oncle (qui) portait complet veston et melon qu’un fil élastique reliait à la boutonnière de son pardessus » ; la mode actuelle des crânes rasés protégés par des casquettes et des bonnets frustre les vents de « leur jeu compulsif de découvre-chef ». J’aime ces vaches dont « la couleur solaire de leur pelage flambait la neige immaculée ».
Ce monde est menacé, la violence des orages, la sécheresse des sols, les incendies qui assombrissent l’horizon, sont les signes précurseurs des bouleversements à venir.
Il faut bien du talent pour faire tenir dans des formes courtes tant de notations poétiques. Roseline Giusti n’en manque pas.
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