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Mort de Thomas : fafs et antifas dans la rue à Bordeaux

Le rassemblement en hommage à Thomas, initié par des organisations d’extrême-droite, a finalement pu se tenir suite à une décision du tribunal administratif qui a suspendu l’arrêté préfectoral. L’Offensive antifasciste Bordeaux (OAB) a organisé de son côté un contre-rassemblement à Saint-Michel.

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Mort de Thomas : fafs et antifas dans la rue à Bordeaux
Rassemblement de l’extrême droite place de la Bourse vendredi 8 décembre (RM/Rue89 Bordeaux)

« Mais c’est qui ? Il se passe quoi ? Ha mais c’est l’extrême droite ! Bah oui, c’est pour Thomas, la France aux Français et tout. »

Ces deux adolescentes passées par la place de la Bourse ce vendredi 8 décembre vers 19h30 résument bien la situation. Le rassemblement, relayé par diverses structures comme la Cocarde Étudiante et la Bastide Bordelaise, a réuni une centaine de personnes sur les pavés mouillés pour rendre hommage à Thomas Perotto et dire « Stop au massacre des Français ».

La tenue de cette manifestation, annoncée en milieu de semaine, a fait l’objet d’un certain suspense. La semaine passée déjà, une réunion similaire sur la voie publique avait été interdite par la préfecture de Gironde. Les services de l’État avaient décrété son interdiction. Ils ont voulu en faire autant en amont de ce 8 décembre. Mais cette fois, le tribunal administratif, saisi en référé-liberté, a autorisé le rassemblement quelques heures avant le rendez-vous.

La requête administrative était portée par un certain François Gauthier, l’un des co-organisateurs de la manifestation. Représenté par maître Pierre-Marie Bonneau, avocat souvent appelé à la rescousse par l’extrême droite, il a obtenu gain de cause. 

L’État condamné à verser 1 500 euros

Pour justifier l’interdiction de la manifestation le préfet de la Gironde avait estimé que François Gauthier, Inès Bererd et Nathan Gardet-Derc, déclarants et organisateurs du rassemblement du 8 décembre 2023, étaient susceptibles de servir de « couverture à des militants de l’ultra-droite bordelais », stipule l’ordonnance du Tribunal administratif consultée par Rue89 Bordeaux. La justice n’a pas été convaincue.

« Il ne ressort d’aucune des pièces versées au dossier par l’administration que les trois personnes ayant déclarées la manifestation projetée présentent un lien avec les groupuscules, dont La Bastide Bordelaise, dont le préfet de la Gironde entend prévenir des actes jugés à risque pour l’ordre public », indique le document.

Le Tribunal a donc suspendu l’exécution de l’arrêté interdisant la manifestation. Par la même occasion, il a condamné l’État à verser 1 500 euros au requérant, François Gauthier. Ce dernier promettra plus tard que cette somme sera investie au service de la « cause » qu’il défend.

« La France est un coupe gorge »

Habitant de la région bordelaise et âgé de 27 ans, c’est lui qui s’exprime au mégaphone pour demander une minute de silence en la mémoire de Thomas Perotto. Ce temps de recueillement passé, il prolonge le message porté par la banderole déployée face à une centaine de manifestants, surtout des hommes, visages tout ou partie dissimulés pour certains : « État coupable – Justice Complice – La France est un coupe-gorge ».

Le discours s’inscrit dans la lignée de l’extrême-droite la plus radicale. « La guerre civile, la vraie, sera déclenchée par le gouvernement et son inaction. Nous sommes là pour la prévenir », scande-t-il au micro. Il réclame pêle-mêle « l’exécution de toutes les OQTF » (obligation de quitter le territoire français), la reconnaissance par la justice du meurtre de Thomas comme étant un « crime raciste anti-blanc », la « fin de l’immigration » ou encore la démission du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin. 

Une Marseillaise conclut le rassemblement qui se dispersera progressivement à partir de 19h45 sans troubles particuliers. Aucun participant à ce rassemblement n’a souhaité répondre à Rue89 Bordeaux (lire ci-dessous).

Occuper la rue

À quelques centaines de mètres de là, au pied de la basilique Saint-Michel, la réplique antifasciste s’est faite entendre. Aux cris de « Siamo tutti antifascisti » ou de « Tout Bordeaux déteste les racistes » une centaine de personnes ont répondu présentes à l’appel de l’OAB.

Un second arrêté préfectoral interdisant tout cortège et défilés non déclarés dans le centre-ville de Bordeaux, l’OAB a relocalisé son rassemblement initialement prévu place Jean-Jaurès.

« Il est important de nous rassembler afin de ne pas rester seuls et d’occuper la rue si débordement il devait y avoir », a rappelé l’un de ses membres :

« La justice a finalement autorisé le rassemblement place de la Bourse, le nôtre est interdit. Nous ne souhaitons pas rester les bras croisés devant cette décision dangereuse et écœurante. L’extrême droite se rassemble, non pas pour se recueillir ou apporter du soutien à la famille de Thomas. Elle s’empare de ce fait tragique pour semer la haine, la division, et avancer ses thèses racistes et xénophobes. »

Les militants ont à nouveau réclamé la fermeture du local Le Menhir, rue Brulatour, fief des organisations d’extrême droite depuis plusieurs années. « Quand la justice autorise un tel rassemblement, elle contribue à laisser la voie libre aux idées racistes et à décomplexer l’extrême droite », s’insurge Jahan Lutz, militant au Poing Levé.

Si le rassemblement bordelais de l’extrême droite a pu se tenir in extremis suite à la décision du tribunal administratif, ce n’était pas le cas dans d’autres villes françaises, comme Toulouse ou Tours, où des manifestations similaires ont été interdites par les préfectures.


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