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La suppression de l’Agence Bio, une « menace pour l’ensemble de la filière », alerte sa branche néo-aquitaine

La suppression de l’Agence Bio, votée par le Sénat avec le soutien du gouvernement, suscite une vive inquiétude parmi les acteurs de la filière. L’Agence Bio Nouvelle-Aquitaine met en garde contre des « conséquences désastreuses » d’une telle mesure, et appelle les sénateurs et les députés à rejeter l’amendement lors de son passage en commission mixte paritaire.

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La suppression de l’Agence Bio, une « menace pour l’ensemble de la filière », alerte sa branche néo-aquitaine
Cultures d’une couveuse bio, dans laquelle les futurs agriculteurs bio apprennent leur métier.

Le projet de suppression suscite un tollé chez les professionnels concernés. À travers un amendement proposé par le sénateur Laurent Duplomb (Les Républicains), « qui a présidé la chambre d’agriculture de Haute-Loire comme élu FNSEA/JA jusqu’en 2017 » selon le média Basta, la proposition, soutenue par la ministre de l’Agriculture Annie Genevard, a été votée au Sénat le 17 janvier dernier. En 2022, un rapport de la Cour des comptes appelait au contraire à un renforcement des moyens alloués à l’agence.

Créée en 2001, la structure assure notamment la promotion des produits bio auprès du grand public, le soutien des projets locaux grâce à l’attribution de financements, ainsi que la collecte et l’analyse des données de la filière, permettant l’orientation des politiques publiques.

Sa fin engendrerait des « conséquences désastreuses », selon le réseau Bio Nouvelle-Aquitaine, émanation de l’organisation au niveau régional :

« Supprimer l’Agence Bio reviendrait à dire aux acteurs du secteur qu’il n’y a pas de place pour des modèles diversifiés et durables, alors que la filière représente plus de 215 000 emplois. […] Région phare de la production biologique, la Nouvelle-Aquitaine compte plus de 9 000 exploitations et près de 2 000 opérateurs économiques qui dépendent directement des actions de l’Agence Bio », détaille le communiqué de presse de l’Agence Bio Nouvelle-Aquitaine.

L’Agence Bio régionale alerte sur les répercussions de cette décision à l’échelle nationale comme régionale. Des effets sur les acteurs du secteur qui seront visibles « d’ici 1 à 2 ans », indique Philippe Leymat, président de l’Interbio Nouvelle-Aquitaine.

« Un coup de massue imprévisible »

L’association interprofessionnelle bio régionale, qui rassemble plus de 300 organisations et opérateurs membres, s’inquiète de la disparition de « la seule structure nationale qui existe pour la filière bio ».

« Si nous n’avons plus d’agence, nous serions la seule filière agricole qui n’a pas de représentation interprofessionnelle à l’échelle nationale », indique Philippe Leymat, président de l’association, tout en soulignant une annonce qui intervient dans un moment pourtant crucial pour l’avenir du secteur.

« La difficulté, c’est qu’aujourd’hui la production progresse, puisqu’il y a 30 % des jeunes qui s’installent en bio. Pour accompagner ça, il y a besoin de sanctuariser les producteurs déjà en place, mais surtout de développer le marché. Ce développement est fortement lié à la communication sur la filière », pointe Philippe Leymat.

La publicité pour la bio, qui est le seul mode de production agricole garanti sans utilisation de pesticides chimique, s’avère cruciale alors que ce secteur connait une crise depuis trois ans, et perd des débouchés, voire la confiance des consommateurs.

Philippe Leymat s’inquiète donc de la disparition des supports de communication, qui ont notamment permis cette année une campagne au niveau régional avec le Conseil Interprofessionnel du Vin de Bordeaux (CIVB), « Bordeaux se décline en bio ! ».

L’Agence Bio Nouvelle-Aquitaine souligne les contradictions entre sa suppression et l’engagement du gouvernement sur des « projets ambitieux », tels que les 20 % de bio minimum garantis en restauration collective grâce à la loi Egalim et l’objectif de 25 % de surface agricole utile (SAU) en bio d’ici 2030.

Une perte de l’expertise

« Un des arguments du ministère, c’est de dire que l’on supprime l’agence mais pas les missions. Mais la filière bio vient d’une expertise très pointue. Je ne dis pas que les agents des autres ministères n’ont pas la compétence, mais sur ce diagnostic et cette expertise de la filière, on l’a perdue clairement », poursuit Philippe Leymat.

Les missions remplies par l’Agence Bio pourraient être prises en main directement par le ministère de l’Agriculture ou l’établissement public FranceAgriMer. Si la suppression est définitivement actée, cette décision risquerait donc d’impacter significativement la filière biologique en France et en Nouvelle-Aquitaine.

Pour l’année 2023, la région comptabilisait 9057 fermes biologiques, soit près de 13,6 % des structures agricoles. Entre 2008 et 2023, le nombre d’exploitations a augmenté de manière significative, passant de 1 880 à 9 057.

Les fermes biologiques de la Nouvelle-Aquitaine en chiffres Photo : carte Bio Nouvelle-Aquitaine

Navette parlementaire

L’Agence Bio appelle les parlementaires à s’opposer au projet. Lors d’une intervention à l’Assemblée nationale le 17 janvier, le député écologiste de Charente Maritime, Benoît Biteau, a dénoncé une agriculture biologique « oubliée dans la distribution des aides publiques ». Loïc Prud’homme, député LFI de la 3ᵉ circonscription de la Gironde, a quant à lui critiqué sur son compte Bluesky « les économies réalisées au détriment de notre santé environnementale et de notre souveraineté alimentaire » par le gouvernement.

Après examen par la commission paritaire, composée de sept députés et de sept sénateurs, la proposition d’amendement sera adoptée ou rejetée, sous réserve de la validation du compromis par le gouvernement. Dans le cas contraire, la navette parlementaire reprendra, avec la possibilité que la version votée par l’Assemblée nationale soit finalement adoptée sur décision du gouvernement.


#agriculture biologique

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