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La Nouvelle-Aquitaine dotée d’une feuille de route de la planification écologique

Une feuille de route de planification écologique pour la Nouvelle-Aquitaine a été lancée vendredi 14 février par la préfecture et la Région. L’initiative, qui comprend 120 actions, risque toutefois de pâtir d’autres politiques publiques, et de la perte d’intérêt pour le sujet au sommet de l’Etat, illustrée par le départ d’Antoine Peillon, secrétaire générale à la planification écologique.

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La Nouvelle-Aquitaine dotée d’une feuille de route de la planification écologique
Ombrières photovoltaïques sur le parking du parc des expositions de Bordeaux

En Nouvelle-Aquitaine, la température annuelle moyenne pourrait s’élever de 3,4°C d’ici 2100, avec un climat qui ressemblerait alors à celui de Lisbonne, et des précipitations en baisse de 29% en été, et en hausse de 12% en hiver.

Ce serait un moindre mal : les scientifiques observent que la planète a pour la première fois franchi l’an dernier le seuil jugé fatidique de 1,5°C de réchauffement global par rapport à l’ère préindustrielle, avec 10 à 20 ans d’avance par rapport aux prévisions initiales, et des risques d’emballements imprévisibles si la tendance se poursuit.

« Une bible sur ma table de nuit »

Pour freiner ce phénomène, et rester sous les 2°C de réchauffement conformément aux accords de Paris de 2015, la France s’est engagée dans une stratégie nationale bas carbone, visant à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 55% d’ici 2030, pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Après une baisse de 5,8% en 2023, ces émissions sont reparties à la hausse au troisième trimestre l’an dernier, à cause notamment d’une augmentation de la consommation énergétique des bâtiments et des transports.

D’où l’urgence d’accélérer sur la « planification écologique » promise, et déclinée dans les différentes régions par des COP (conférences des parties). En Nouvelle-Aquitaine, qui représente 9% de l’effort national de réduction d’émissions, la consultation organisée du 29 octobre au 30 novembre 2024 a associé 45000 collectivités locales et 450 structures.

Lors de la dernière, tenue ce vendredi à Bordeaux en présence d’Antoine Peillon, secrétaire général à la planification écologique, organisme interministériel chargé de coordonner les politiques sur le sujet, a été exposée une feuille de route de 120 actions pour la période 2025-2030.

« Ce document, c’est une bible, je vais l’avoir sur ma table de nuit, a affirmé le préfet de Région, Etienne Guyot, annonçant qu’un premier rendez-vous aurait lieu à l’automne pour suivre la mise en œuvre de ces « actions très concrètes, avec des pilotes et des indicateurs ».

Prise de conscience

Nombre de ces propositions, listées en 6 thématiques – décarbonation de la mobilité, du secteur du bâtiment, de l’industrie et du cycle de l’énergie, protection de la biodiversité et économie sobre en ressources -, englobent en fait des projets déjà en cours, sans leur allouer de moyens supplémentaires.

C’est le cas notamment des RER girondin et basco-landais, dont il est préconisé d’ »accélérer la mise en service », des plans vélos départementaux, déjà lancés à certains endroits comme la Gironde, du déploiement des réseaux de chaleur dans les villes, ou encore de la promotion des projets d’autoconsommation d’énergie renouvelable.

L’intervention coordonnée de l’Etat et de la Région Nouvelle-Aquitaine, à la manœuvre sur ces sujets via le programme Néo Terra et le Sraddet (schéma régional d’aménagement et de développement durable des territoires) entend toutefois permettre d’accélérer sur des sujets qui peinent à s’imposer (le covoiturage, la valorisation des déchets organiques…) ou dans des collectivités plus à la traîne.

« Cela contribue à la prise de conscience, mais ce n’est pas suffisant », a commenté Daniel Delestre, président de la Fédération Sepanso Aquitaine, ONG de défense de l’environnement :

« Le problème c’est qu’on ne change toujours pas de référentiel, qu’on ne remet pas en cause la croissance et qu’on espère que la technique va nous sauver. Et on ne fait pas de liens entre les différentes politiques. Le préfet ne veut par exemple pas toucher aux vols de nuit à l’aéroport de Bordeaux car cela amène des touristes, alors que l’aviation est l’un des principaux postes d’émissions de gaz à effet de serre de l’agglomération. »  

Backlash

Ainsi, la feuille de route mentionne GPSO (LGV Bordeaux-Toulouse et Bordeaux-Dax) dans la rubrique « mieux se déplacer », sans préciser que le projet entraînera la disparition de 4800 hectares d’espaces naturels, agricoles ou forestiers.

Concernant la qualité de l’eau, gravement dégradée par l’utilisation de pesticides, la planification écologique régionale semble timide. Ainsi, elle préconise de « doter les captages dégradés de PGSSE (plans de gestion de sécurité sanitaire des eaux) intégrant la prévention contre les pollutions diffuses » – qui doivent être généralisés d’ici mi-2027 pour se conformer à la directive européenne Eau potable -, ou de mettre en œuvre des actions volontaires de protection des captages prioritaires, engagés par la Région via le programme Re-Sources.

Alors que la ministre de l’agriculture milite pour ré-autoriser des pesticides interdits en France s’ils sont tolérés ailleurs en Europe, les intentions risquent donc d’être remises en question dans un contexte de backlash sur l’écologie. Et par la perte d’influence de ceux qui la défendent au gouvernement, où François Bayrou n’en fait pas une priorité. Vendredi à Bordeaux, Antoine Peillon a d’ailleurs effectué son dernier discours en tant que secrétaire général, avant de démissionner pour rejoindre le privé.


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