Outre les 4 listes les plus connues du public – celle du maire sortant Nicolas Florian (Les républicains), de l’union de la gauche et des écologistes autour de Pierre Hurmic (Europe écologie-Les Verts), de Thomas Cazenave (République en marche !) et de Philippe Poutou (Nouveau parti anticapitaliste soutenu par la France insoumise), 5 autres listes font campagne pour décrocher les clés du Palais Rohan.
À l’unanimité, ils déplorent le manque de place qui leur est accordée dans les médias, et leur absence pour la plupart (à l’exception de Bruno Paluteau RN invité lors du dernier débat de France 3 Nouvelle-Aquitaine ce 11 mars) dans les débats télévisés organisés.
Trois d’entre eux – Pascal Jarty (sans étiquette), Gilles Garçon (Union populaire républicaine, UPR) et Yves Simone (sans étiquette) – se sont même fendus d’un communiqué commun pour dénoncer une « exclusion anti-démocratique » de cette émission :
« Les règles d’un débat qui se dit équitable et démocratique ne peuvent être fixées en fonction des sondages. Le vote ne peut être le reflet d’un débat biaisé par des opinions décrétées dominantes. »
Mercredi, devant les locaux de France 3, les militants de l’UPR sont venus manifester leur mécontentement à l’heure d’un débat sur les municipales.
Ajoutons à ces quatre noms celui de Fanny Quandalle (Lutte ouvrière), déjà candidate en 2014, est l’une des dernières à s’être déclarée. Présentations.
5 listes, 5 personnalités
Après l’invalidation de la liste d’Allaouia Berrahma « Aujourd’hui et demain, ensemble, Bordeaux est à vous ! », Fanny Quandalle reste la seule femme de ce scrutin. A 47 ans, elle se présente une nouvelle fois à la tête de la liste Lutte Ouvrière à Bordeaux où elle obtenu 0,51% des voix en 2014.
Cette employée de la Poste se veut la candidate des travailleurs « sur qui tout repose », et veut faire face à « ce monde capitaliste qui aujourd’hui nous conduit à notre perte tant que sur le plan de l’économie que sur ceux des conflits mondiaux, de l’environnement et de la catastrophe climatique ».
Si un rapprochement avec la liste « Bordeaux en luttes » menée par Philippe Poutou a pu être « évoqué », Fanny Quandalle revendique :
« On veut clairement dire que l’organisation de la société capitaliste changera et sera aux mains des travailleurs par les luttes, grèves, les armes de la classe ouvrière. […] On pense exactement le contraire des balivernes de la France insoumise et Jean-Luc Mélenchon qui a déclaré “votez pour moi et vous économiserez des kilomètres de manifs”. »
Également candidat en 2014, Yves Simone avait alors récolté 2,79% des voix, devant Philippe Poutou (2,51%). Sans étiquette, et guide bordelais depuis 42 ans, il a présenté 540 émissions sur le patrimoine bordelais pendant 18 ans sur TV7 avant d’être « mis dehors ». Son regard sur Bordeaux, ses monuments et ses quartiers, lui donne selon lui « la prétention d’avoir des idées pour la ville » qu’il aimerait « partager, confronter et voir reprises ».
Un nouveau leader pour le RN à Bordeaux
Quant aux trois autres candidats, c’est leur première tentative pour remporter la mairie à Bordeaux. Bruno Paluteau (RN) est engagé en politique depuis ses 18 ans, passé par le RPR (Rassemblement pour la République), le MNR (Mouvement national républicain) de Bruno Mégret au début des années 2000, puis le Front national en 2010. Candidat frontiste en Seine Maritime en 2011 lors des élections cantonales, puis sur la 3e circonscription de Gironde en 2012, ensuite candidat aux législatives, départementales, ce chirurgien dentiste est élu conseiller municipal en 2014 à Bègles.
Enfin, il a participé aux élections régionales en décembre 2015, et aux législatives de 2017. A Bordeaux, Bruno Paluteau souhaite prendre la suite de Jacques Colombier, figure du mouvement dans la métropole, devenu député européen. Il a envisagé de devenir maire de Bordeaux « depuis un an environ » car « c’est un devoir démocratique d’être présent, pour nous et pour nos électeurs, même si c’est une terre de mission ».
Gaullistes sur le retour
En revanche, Pascal Jarty et Gilles Garçon se présentent pour la première fois comme tête de liste à une élection. Le premier, ancien directeur du Centre information Jeunesse Aquitaine (CIJA), a toutefois été conseiller municipal dans l’équipe de Jacques Chaban-Delmas. Et il se rappelle avoir eu l’envie de se présenter après le départ d’Alain Juppé et, en juillet dernier, la canicule le conforte dans son idée alors que les expulsions de squats le scandalisent.
Enfin, Gilles Garçon partage avec Pascal Jarty un premier engagement sous Chaban-Delmas – à 16 ans, il participe en 1974 depuis Paris à la campagne du maire de Bordeaux à la présidentielle.
Ce gaulliste déclaré est désormais membre de l’UPR (Union Populaire Républicaine) fondée par François Asselineau, après être passé par l’UDI (Union des démocrates et indépendants). Il a exercé différents métiers, principalement en tant que chef d’entreprise, et défend un « programme original » et une diversité avec une liste « de droite, de gauche, du rassemblement national, et des tas de gens de toutes origines ».
5 projets pour Bordeaux
Les 5 candidats sont déterminés à faire entendre leurs propositions. Yves Simone est ravi que deux de ses idées de campagne de 2014 aient selon lui été reprises par les juppéistes : l’ouverture de la bibliothèque de Mériadeck le dimanche (sans doute plutôt inspirée par le rapport Orsenna) , et la construction d’un immeuble en ossature bois, qui voit le jour du côté d’Euratlantique.
Il aimerait cependant que ces deux mesures soient désormais développées, avec une ouverture des bibliothèques le soir, et que progressivement, jusqu’à 50% des nouvelles constructions soient en ossature bois. « Car Bordeaux est la capitale de la forêt des Landes, et pour des raisons écologiques la ville du XXIe siècle doit être la ville de bois », explique Yves Simone.
Parmi ses autres préoccupations : alterner la circulation sur la rocade en fonction des plaques minéralogiques paires et impaires, ou améliorer la propreté de ses rues. Enfin, il souhaite également que « deux jours par an, l’office du tourisme, les restaurants, les musées donnent 1 à 2% de leurs recettes pour Haïti.
« Car je suis violemment contre le mémorial de l’esclavage à Bordeaux mais plutôt pour qu’on aide directement un des pays les plus pauvres. »
L’urne ouvrière
Fanny Quandalle explique que Lutte Ouvrière a, pour cette élection, déposé 261 listes à Mérignac, Bègles, Langon, Saint-Léger-de-Balzon ou encore Libourne qui voit pour la première fois une candidature LO. Des conseillers municipaux trotskistes serviraient selon elle « d’appui aux combats des travailleurs des quartiers, aux luttes des mères de famille ».
« Tout ce qu’on a obtenu, ce fut par les luttes, et non par les urnes. »
Elle espère ainsi « en finir avec ce patriarcat, le racisme et toutes les formes d’exclusion ».
Pascal Jarty tacle de son côté « la bétonisation, la rentabilité à outrance » :
« Il y a eu Pey-Berland, ils n’ont pas compris, ils ont recommencé place Tourny. Je propose un an de moratoire avec toutes les parties prenantes en terme d’urbanisme, […] pour développer un Bordeaux d’équilibre et apaisé en prenant avant tout les habitants et le bien-être. Il faut repenser le mode de circulation dans la ville et revenir à un dispositif de bus en site propre. »
Des RIC
Comme Philippe Poutou, Pascal Jarty est favorable à la gratuité des transports en commun, financée par l’augmentation de la taxe de séjour sur les nuitées des touristes et par l’installation de panneaux photovoltaïques permettant de vendre de l’électricité à EDF.
L’axe principal de la campagne de Gilles Garçon consiste à « rétablir un lien de confiance entre le citoyen et l’élu » à travers des référendums d’initiative citoyenne sur des sujets comme l’aménagement des boulevards.
Il défend également un arrêt des grands programmes de logements neufs et la création d’un « centre d’accueil ouvert 24/24 pour recueillir ceux en situation de grande précarité où ils pourront se laver, être orientés par exemple vers les urgences, les assistantes sociales, évaluer les besoins… » explique Gilles Garçon. Mais aussi la mise en place d’un hôtel municipal pour loger les personnes en difficultés (femmes victimes de violences, mineurs…) de façon temporaire.
Enfin, côté sécurité, le candidat UPR souhaite le recrutement de 50 policiers municipaux et la création d’une application permettant aux citoyens de dénoncer une incivilité.
Faut-il armer la police municipale ? Bruno Paluteau dit oui, tout en ajoutant vouloir « travailler en synergie avec la police nationale, grâce à une vidéo protection partout dans Bordeaux, et l’installation d’un éclairage intelligent dans les zones sombres de Bordeaux qui s’éclairent lors du passage d’un vélo, piéton ou voiture ».
Fondamentaux de l’extrême-droite
Pour le candidat du Rassemblement National, la priorité de cette campagne « la démétropolisation, pour désengorger la ville, avec une revitalisation des villes périphériques voire des villes moyennes que la métropole bordelaise étouffe comme Angoulême, Périgueux, Poitiers, Limoges » mais aussi « la revitalisation des centre-bourgs des zones périphériques où il y a bon nombre de chômage, de pauvreté, qui a conduit à la crise des gilets jaunes ».
Il aspire également à « un équilibre des moyens de transport » tout en évitant « la stigmatisation systématique de la voiture et les automobilistes sur fiscalisés ».
A Bordeaux, les quartiers doivent devenir des « villages » avec une économie locale et des circuits courts. Des quartiers qui, selon lui, « ont besoin de sens et d’identité, ce qui fait notre identité française qu’au RN et à la droite populaire nous conservons, nous défendons : la France éternelle ».
D’ailleurs, le RN n’a pas renoncé à ses projets de « préférence nationale », son programme prévoyant notamment de « réserver les aides et les logements sociaux aux personnes françaises défavorisées. Du côté des fondamentaux de l’extrême-droite, on trouve aussi parmi les idées de Bruno Paluteau de « s’opposer à l’installation de migrants » et à la présence de mineurs non accompagnés dans la commune.
Bruno Paluteau défend sa liste comme une « alternative patriote souverainiste nationale par rapport à des listes qui sont de gauche, ultra libérales ou mondialistes » et « lance un appel vibrant à tous les électeurs de Nicolas Sarkozy et François Fillon de me rejoindre, qu’ils ne se retrouvent pas ensuite en coalition chez M. Florian où il y a beaucoup de contradictions sur sa liste ».
Pour les 5 candidats sans exception, pas question de parler d’un second tour auquel les sondages ne leur laissent guère de raison d’espérer. Il y a un mois, l’enquête Ipsos pour Sud Ouest donnait ainsi Bruno Paluteau à 5%, Pascal Jarty à 2%, Gilles Garçon à 1%. Encore non déclarés, Fanny Quandalle et Yves Simone n’ont pas été testés.
Logiquement, aucun des candidats ne s’avance pour l’heure sur des consignes de vote.
Chargement des commentaires…