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Les prisons de France encore épinglées, Bordeaux-Gradignan toujours mauvais élève

L’Observatoire international des prisons et Amnesty International ont publié un nouveau rapport accablant sur l’état des prisons. Le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan, dont les drames s’accumulent, trône toujours en tête du podium de la surpopulation carcérale.

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Les prisons de France encore épinglées, Bordeaux-Gradignan toujours mauvais élève

Le 1er juin, la prison de Bordeaux-Gradignan essuyait un troisième décès en un mois, après un incendie en cellule. Un jeune homme de 20 ans perdait la vie, son codétenu était grièvement blessé et transféré au CHU de Bordeaux. Le lendemain, Dominique Simmonot, la Contrôleure générale des lieux de privation de liberté (CGLPL), publiait son rapport. Lors de sa présentation en conférence de presse, relayée par Streetpress, elle prenait le centre pénitentiaire local en exemple :

« C’est une prison à l’abandon. Des cellules d’une personne sont occupées par deux à quatre détenus. Ils n’ont pas la place de se tenir debout les quatre ensemble. »

Quinze jours plus tard, l’Observatoire international des prisons (OIP) et Amnesty International en remettent une couche dans leur rapport rendu public ce jeudi 16 juin, « Dignité en prison. Quelle situation deux ans après la condamnation de la France par la Cour européenne des droits de l’homme ? ». Ce « bilan sévère » contre « l’inefficacité des mesures prises par les pouvoirs publics » pousse les deux organisations à demander un plan national d’urgence contre l’indignité et la surpopulation :

« Face à une situation chaque jour un peu plus intenable et alors que s’ouvre une nouvelle séquence politique, il y a urgence à ce que les pouvoirs exécutifs et législatifs assurent enfin le respect des droits fondamentaux en prison. »

La France épinglée quatre fois en deux ans

Car la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH). Elle a aussi été rappelée à l’ordre par la Commission nationale consultative des droits de l’Homme, en mars :

« Les mêmes constats ont été maintes fois dressés. L’inertie à résoudre ces manquements questionne la volonté politique des pouvoirs publics français. »

Il y a un an, le Comité européen pour la prévention de la torture (CPT) évoquait, lui aussi, une « surenchère sécuritaire ». Dans l’onglet « vétusté, insalubrité, oisiveté », il évoquait la prison de Bordeaux-Gradignan « en particulier ». Rendait compte d’un « état de délabrement avancé », où les cellules décrépies ont des problèmes de fenêtres, de température, d’humidité, de moisissure et de cafards :

« Une situation qui rendait la détention insupportable, tout comme les conditions de travail des personnels. »

Le comité demandait alors de réduire le taux d’occupation des prisons françaises et un « changement de paradigme sur le recours à la privation de liberté qui doit réellement devenir l’exception ». Le Conseil de l’Europe s’inquiétait, lui, de l’augmentation des personnes en détention.

Dans une cellule de Gradignan Photo : SB/Rue89 Bordeaux

La prison de Bordeaux-Gradignan surpeuplée à 238 %

Quarante-cinq prisons françaises ont été condamnées pour conditions de détention indignes. Si le centre pénitentiaire de Bordeaux-Gradignan ne figure pas sur la liste – malgré sa première place sur le podium de la surpopulation, dont Rue89 Bordeaux expliquait récemment les causes -, il reste un exemple assez criant de cette problématique nationale. Il fait en effet partie des quatre maisons d’arrêt ou quartiers maison d’arrêt qui affichent un taux d’occupation supérieur à 200 %.

En début d’année, les syndicats (Ufap-Unsa Justice et FO) des surveillants avaient d’ailleurs alerté les élus girondins sur le sujet, conduisant les sénatrices de la Gironde Monique de Marco et Laurence Harribey à utiliser leur droit de visite impromptue des prisons.

« Si ces chiffres traduisent déjà une surpopulation carcérale alarmante, ils sont cependant trompeurs et la réalité est plus affolante encore », précise le rapport de l’OIP et d’Amnesty International.

Ils expliquent que le taux d’occupation n’est pas communiqué par la direction de l’administration pénitentiaire ; les moyennes publiées incluent les quartiers femmes, mineurs, « rarement pleins, contribuant mathématiquement à faire baisser le taux global ».

« Le calcul des taux d’occupation des quartiers hommes au 1er mai 2022 donne le vertige : à Perpignan, on passe alors d’un taux moyen de 214% à un taux chez les hommes de 271 % ; à Bordeaux, on atteint 238 %. »

Sortir du systématisme de la prison

La dernière visite de la CGLPL peignait un établissement « dans un état désastreux », qui n’avait quasiment pas changé depuis 2009. Elle reconnaissait que peu d’espoir était à attendre avant la fin des travaux de la nouvelle prison, dont la fin de la phase 1 devrait prendre fin en 2023. Avec suffisamment d’espace ? Pas vraiment, l’établissement futur promet 337 places, contre 305 actuelles… et tout ça pour 676 prévenus.

Toutes les recommandations des instances se rejoignent. Deux grands axes se dégagent. D’abord, elles indiquent qu’il faut sortir d’une justice qui systématise les peines de prison afin de réduire la surpopulation. Ensuite, elles critiquent la réponse apportée par l’État français, qui s’obstine à accroître le parc carcéral national. Ce dernier rapport ne fait pas exception : « plus on construit, plus on remplit » dit-il. Et un tour en comparutions immédiates au tribunal de justice de Bordeaux promet déjà de remplir les recoins de cellules encore vides de Bordeaux-Gradignan.


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