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Racisme et discrimination toujours au programme de candidats d’extrême droite aux législatives en Gironde

En France, le racisme et l’antisémitisme sont des délits, tout comme la discrimination et l’appel à la haine. Sur cette base, Rue89 Bordeaux a épluché les réseaux sociaux des candidats d’extrême droite investis dans les circonscriptions de Gironde. Islamophobie, climatoscepticisme, relations sulfureuses… les (mauvaises) surprises ne manquent pas.

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Racisme et discrimination toujours au programme de candidats d’extrême droite aux législatives en Gironde
Image de fond : Virginie Tournay, candidate Reconquête aux législatives, aux côtés de Papacito

« Le racisme n’est pas une opinion mais un délit », cette phrase attribuée à Guy Bedos résume l’angle de cet article sur la base de la loi de 1972 qui a créé le « délit de provocation à la discrimination, à la haine ou à la violence contre les personnes, à raison de leur appartenance à une ethnie, une nation, une “race“ ou une religion déterminée ».

Rue89 Bordeaux s’est penché sur la vitrine des candidats de l’extrême droite : leurs réseaux sociaux. On retrouve des Rassemblement national, des Reconquête, et d’autres qui ont fréquenté ou l’un et l’autre et qui se présentent sans étiquette.

Après sa victoire aux Européennes, le Rassemblement national (RN) a investi environ 500 candidats. Soucieux de parfaire sa « dédiabolisation », le parti lepéniste tente bien de faire le ménage dans ses troupes, afin d’éviter d’avoir à répondre de leur sorties de piste.

Prompt à taxer la France insoumise d’antisémitisme, fort du soutien récent de Serge Klarsfeld, le RN a cependant dû suspendre un de ses candidats dans le Morbihan, suite à une enquête de Libération qui a exhumé un tweet digne du « détail de l’Histoire » de Jean-Marie Le Pen.

Qu’en est-il en Gironde ? Tour d’horizon 2.0 de l’extrême droite locale, qui n’est toujours pas parvenue à ranger ses vieux démons au placard.

Papacito et pop identitaire

Le parti zemmouriste Reconquête a investi 5 candidats dans le département. Dans la 1er circonscription (Bordeaux Nord), on retrouve Virginie Tournay, référente girondine des Parents Vigilants. Un mouvement qui entend dénoncer le « lobby LGBTQIA+ » et « l’islamisation de l’école ».

Dans la métropole, Parents Vigilants s’est attaqué à un menu halal servi au collège Émile-Combes et, plus récemment, à un stage « drag » pour les adolescents, proposé à Mérignac. Suite à la pression et aux menaces, l’atelier artistique a finalement été annulé.

Très active sur le réseau social X, Virginie Tournay est vent debout contre le « wokisme » et affiche fièrement ses inspirateurs. Dans une vidéo, postée en novembre 2023, elle filme sa bibliothèque. Dans celle-ci trône La dépossession de Renaud Camus, théoricien du « grand remplacement », les livres du journaliste Laurent Obertone, pourfendeur de « l’ensauvagement » de la société française, ou encore la série de BD Breum du dessinateur d’extrême droite Marsault (condamné en 2019 pour harcèlement et injure publique envers une militante féministe).

Une fachosphère avec laquelle Virginie Tournay prend la pose sans complexe, notamment lors d’une soirée dédicace organisée par la revue La Furia et les éditions Magnus à Paris en septembre 2023. On y voit aussi le youtubeur Ugo Gil Jimenez, alias Papacito, condamné cette année par la justice pour injures publiques homophobes et incitation à la violence.

Photo : Capture écran

Dans la 7e circonscription (Pessac / Cestas / Gradignan), Reconquête a investi celui qui se présente comme « auteur, compositeur, interprète », Dominique de Witte. En janvier, il a sorti son single « Pas woke », disponible sur toutes les plateformes d’écoute. On vous laisse apprécier.

« Zone de non-France »

Dans la 2e circonscription (Bordeaux centre) se présente un certain Yanis Iva, candidat sans étiquette, mais cadre bien connu de La Bastide bordelaise, groupuscule qui a pris le relai après la dissolution de Bordeaux nationaliste. Le militant qui présente le fascisme comme une « belle chose » dans un entretien accordé à 20 Minutes, a été impliqué dans les violences qui ont émaillé la Marche des fiertés bordelaise en 2022 et l’agression à caractère raciste de riverains dans le quartier Saint-Michel.

L’obsession de ce dernier pour l’immigration est aussi visible chez le député sortant RN du Médoc (5e circonscription), Grégoire de Fournas, l’un des deux élus girondins du RN à l’Assemblée nationale. Cette figure sulfureuse de la galaxie lepéniste s’est faite connaître pour avoir crié « Qu’il retourne en Afrique ! » dans l’hémicycle de l’Assemblée nationale il y a un an. L’invective xénophobe lui a valu la sanction la plus lourde, une exclusion de 15 jours. En mars 2022, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, il publiait un tweet ambigüe à l’encontre des réfugiés.

Photo : Capture écran X

En octobre 2023, le site antifaciste La Horde a révélé le passé trouble du député sortant, à la tête d’une section locale du groupuscule radical Bloc identitaire. En 2010, il est pris en photo lors d’un « happening » à Pauillac, aux côtés de deux militants vêtus d’un voile intégral, avec une pancarte où est écrit « Si vous ne voulez pas finir comme moi, rejoignez les Identitaires ! ».

Le voile, dont le Rassemblement national souhaite purement et simplement interdire le port dans les espaces publics, au mépris de la loi de 1905, dérange aussi Jimmy Bourlieux. Ce délégué départemental du RN, secrétaire général du groupe à la Région, et candidat dans la 6e circonscription (Mérignac) pour la seconde fois, compare le marché de Cenon à une « zone de non-France » dans une publication Facebook.

Photo : Capture écran Facebook

« Sommes-nous seulement encore en France, à Bordeaux, un jour de Fête Nationale alors qu’il y a plus de drapeaux algériens que français dans les rues ? », s’interroge, de son côté, Bruno Paluteau, candidat RN dans la 1re circonscription (Caudéran / Le Bouscat / Bruges) et ancien candidat aux municipales de Bordeaux.

Dans une publication Facebook, à la suite de la fête du 14 juillet, il demande au maire de la capitale girondine de « prendre un arrêté municipal pour interdire [ces] drapeaux étrangers ».

Climatoscepticisme et transphobie

On retrouve des publications de la même teneur sur les réseaux de Sandrine Chadourne, conseillère municipale à Pineuilh et conseillère régionale RN depuis 2015. Elle se représente dans la 10e circonscription (Libournais). Libourne, qu’elle a comparé à Mogadiscio, suite à un fait divers survenu dans la ville. Après la sous-préfecture, c’est au tour de Sainte-Foy-la-Grande d’être comparée au Maghreb.

Photo : Capture écran Facebook

En 2020, sur Facebook, elle a partagé une vidéo Youtube de Génération identitaire, dissout en mars 2021, où un militant du groupe d’extrême droite « reloge un sdf français ». L’élue y ajoute le commentaire suivant : « Français, Françaises… Donnez utile !!! Les nôtres avant les autres !!! ». Elle rempile en septembre 2023, avec un commentaire se voulant humoristique au-dessus d’une photo prise sur l’île de Lampedusa.

Photo : Capture écran Facebook

À noter chez Sandrine Chadourne un climatoscepticisme avéré. Dans une publication Facebook, elle qualifie le GIEC de « Groupe d’experts incompétents et calamiteux, de gauche et grassement payés !!! ». Elle est aussi l’auteure de plusieurs publications transphobes. Pour la candidate, en effet, il « n’existe que 2 genres, homme et femme ! » (publication de juin 2023). Elle s’attaque ainsi à Logan Brown, homme trans enceint, qui a fait la une du magazine britannique Glamour.

Photo : Capture écran Facebook

Dans une récente enquête, Libération a relevé des « likes » de Sandrine Chadourne sur des pages antisémites comme le journal Rivarol ou le site Jeune nation. En 2017, le quotidien avait épinglé des fake news de celle qui était déjà candidate aux législatives.


#législatives 2024

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