« Johnson et Johnson, c’est un mois pour la vaccination complète », lance Stéphane Latour, le ton diplomate et pédagogue. Son interlocuteur devra donc se contenter d’un café à emporter. Les autres clients de la journée ont joué le jeu. « 90% des personnes avaient leur passe sanitaire à jour », assure le serveur de la Brasserie du Passage Saint-Michel depuis maintenant vingt ans. D’une place à une autre, sur celle du Parlement, rares sont ceux à s’aventurer sans le passe ce lundi 9 août. « Il le faut même en terrasse ? » s’étonne une famille. Elle n’ira pas plus loin.
A compter de ce 9 août, le passe sanitaire est exigé pour les clients des restaurants, bars et cafés, en intérieur comme en terrasses. Pour obtenir le précieux QR code, ils devront ainsi présenter un test négatif de moins de 72 heures, un schéma vaccinal complet ou un test positif Covid de plus d’onze jours et moins de six mois.
« Une minorité en colère »
A l’image des cinémas ou des stades, les restaurants doivent désormais contrôler le passe. Stéphane Latour n’a pas pour autant constaté de perte de temps sur le service du midi.
« Je pense que cela prend plus de temps aux clients pour chercher le passe sanitaire que nous pour le scanner, estime le serveur. Ce sera peut être plus compliqué ce soir, à l’heure de l’apéritif où il y aura beaucoup plus de monde, quand dix personnes voudront s’asseoir en même temps pour boire un coup. »
Malgré quelques clients récalcitrants et « une minorité en colère », le serveur n’a pas eu de difficultés pour vérifier les QR code.
« Ce n’est pas notre rôle de contrôler. Nous ne sommes pas dépositaires de l’autorité pour entraver les libertés. Je n’ai pas à connaître l’identité de celui qui vient dans mon restaurant », soutient de son côté Nordine Raymond, restaurateur lui aussi, opposé à la mesure.
Jusqu’à 9000 euros d’amende
Il s’inquiète par ailleurs des tensions qui pourraient naître de cette situation. Une appréhension partagée par la plupart des patrons de restaurants avant ce premier service.
« On était quand même un petit peu inquiets et en définitive tout s’est bien passé », se réjouit Pascal Auclert, propriétaire du Petit Commerce.
Même si ce dernier ne comprend pas personnellement « l’intérêt de cette mesure notamment pour les terrasses », il est bien obligé d’appliquer la loi. Pour rappel, les restaurateurs encourent jusqu’à un an de prison et 9 000 euros d’amende en cas de multiples manquements.
Si des contrôles seront effectués par les policiers, une « semaine de pédagogie » sera observée, affirme-t-on du côté de la préfecture de Gironde, conformément à l’annonce du porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. Une semaine de tolérance mais avec des limites, cas par cas.
Inquiétudes
De l’aveu même des restaurateurs, il sera toutefois compliqué de passer de la tolérance à la fermeté. Pour le gérant du Petit Commerce, cette semaine est surtout « l’occasion de bien se mettre en jambe, de voir à quelles problématiques on est confrontés, pour être mieux préparés dans une semaine ».
A contrario, chez les Frères Cailloux, on admet ne pas avoir vérifié le passe de tout le monde aujourd’hui. « La semaine prochaine, cela va être très difficile, on va voir ce que cela va donner ». La serveuse craint que « les gens aient peur d’être refusés et ne se déplacent pas », et relève déjà une « fréquentation moindre ». Une baisse non ressentie par Stéphane Latour ou Pascal Auclert. Le propriétaire du Petit Commerce préfère toutefois ne pas s’avancer et attend de voir ce week-end, pour lever l’incertitude.
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