Cet été 2022, au crépuscule duquel la forêt girondine brûle toujours, où les vagues de chaleur ont fait au moins 11000 morts et privé plus d’une centaine de communes d’eau potable, semble en avoir fait déciller certains. Le péril climatique est imminent, et non plus l’affaire hypothétique de générations futures.
Si le travail sur cette « charte pour un journalisme à la hauteur de l’urgence écologique » a été entamé il y a des mois, conduit par des dizaines de journalistes francophones de différents médias, dont la Girondine Anne-Sophie Novel, la situation actuelle rend nécessaire l’engagement de chacune et chacun.
A commencer par les médias, qui selon le GIEC (Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat), ont « un rôle crucial dans la perception qu’a le public [du changement climatique], sa compréhension et sa volonté d’agir ». Il y a pourtant du boulot, estiment les journalistes à l’origine de la charte :
« À l’heure où le climat s’emballe, certaines pratiques journalistiques sont encore en décalage avec la gravité de la situation : les images d’enfants qui jouent dans l’eau pour illustrer des vagues de chaleur mortelles, l’invitation en plateau de personnes qui minimisent le problème, l’appel aux “petits gestes” sans remise en cause des principales sources d’émissions de gaz à effet serre… Certaines rédactions ne disposent même pas de rubrique “écologie” alors que tout notre modèle de société doit être réévalué à l’aune de cette urgence. »
Plus de 500 signataires
Officiellement lancée ce mercredi 14 septembre 2022, le texte soumis depuis quelques semaines à la profession est soutenu par une quarantaine de scientifiques qui travaillent sur le sujet. Il a d’ores et déjà été signé par 50 rédactions, 500 journalistes et la conférence des écoles de journalisme. Rue89 Bordeaux a choisi de signer cette charte qui correspond en tous points à sa ligne éditoriale depuis plus de 8 ans.
La charte, lisible intégralement ci-dessous ou accessible sur le site dédié, comporte 13 engagements clés, cernant les « meilleures pratiques pour améliorer le traitement de tous les sujets liés au climat, au vivant et à la justice sociale ». Premiers engagement : les aborder « de manière transversale ». « L’écologie ne doit plus être cantonnée à une simple rubrique, elle doit devenir un prisme au travers duquel considérer l’ensemble des sujets », indique la Charte.
Dans Rue89 Bordeaux, l’impact sur la biodiversité, la pollution et le réchauffement climatique, aussi bien que les conséquences de ce dernier sur le territoire, sont des dimensions prégnantes de nos articles, qu’il s’agisse d’érosion du littoral, de débats sur les infrastructures de transport comme le grand contournement autoroutier ou les LGV, ou encore d’urbanisme ou d’architecture.
Le tout en faisant œuvre de pédagogie, en rappelant par exemple les objectifs des collectivités en matière de réduction de leurs émissions de gaz à effet de serre, et en questionnant les solutions présentées. Nous tâchons également, comme le suggère la charte, d’ « enquêter sur les origines des bouleversements en cours » en questionnant « le modèle de croissance et ses acteurs ».
Le hic de la pub ?
Un autre engagement consiste à « s’opposer aux financements issus des activités les plus polluantes ». C’est ce qu’avait par exemple acté le Guardian, précurseur en la matière, en refusant par exemple toute publicité des compagnies pétrolières. Rue89 Bordeaux n’a jamais eu à décliner des demandes d’annonceurs de ce tonneau (ou encore des secteurs automobiles et de la grande distribution), et ne diffuse que des publicités d’intérêt général émanant principalement des collectivités. Et la réclame pèse moins que les abonnements dans notre modèle économique.
Nous soutenons donc le point N°10 de la charte, qui encourage les journalistes à « exprimer sans crainte leurs désaccords vis-à-vis des financements, publicités et partenariats média liés à des activités qu’ils jugent nocives aux intérêts de l’humanité et de la nature ». Même s’il s’agit d’une façon (trop ?) prudente d’aborder la question sans obliger les médias à couper les ponts avec leurs annonceurs les plus lucratifs.
Enfin, nous prônons bien sûr un « journalisme bas carbone » : pour les besoins de leurs déplacements domicile-travail et de leurs reportages, nos journalistes utilisent tous le vélo ou les transports en commun dans la métropole, covoiturent quand c’est possible pour des reportages plus loin en Gironde. Ils n’utilisent la voiture que pour se rendre sur des lieux non desservis par les transports en commun, et le jet privé seulement pour se rendre à Saint-Emilion ou le yacht pour un petit tour sur la Garonne.
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