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Un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim, selon une enquête des assos étudiantes

Une étude nationale de la Fédération des associations générales étudiantes rapporte des conclusions de plus en plus alarmantes sur la précarité des étudiants sur l’Hexagone. Bordeaux n’échappe pas à ce constat, les associations fustigent un status quo.

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Un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim, selon une enquête des assos étudiantes
500 000 repas à 1€ ont été servis par le Crous de Bordeaux-Aquitaine depuis la rentrée 2023

« Le coût de la vie étudiante ne fait qu’augmenter, et avec lui, les rêves d’un enseignement supérieur accessible à toutes et tous s’éloignent. » L’avant-propos de la consultation étudiante menée par la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) est sans appel. Il traduit les conclusions d’une enquête nationale menée auprès de 7531 étudiants du 23 septembre au 10 décembre 2023.

Face aux difficultés pour se loger et se nourrir, l’obligation de travailler en parallèle, mais aussi les risques d’isolement, l’enquête met les Crous (Centres régionaux des œuvres scolaires et universitaires) au centre de ces problématiques.

« Aujourd’hui, le réseau des œuvres et plus globalement les parties prenantes de l’enseignement supérieur assurent-ils suffisamment leurs missions pour garantir l’égalité des chances et le bien-être étudiant ? », s’interroge l’enquête intitulée Bouge Ton Crous. Si le questionnaire sur lequel celle-ci s’appuie aborde différentes missions des CROUS – aides sociales, logement, culture… -, la restauration est un point essentiel :

« C’est unE étudiantE non bousierE sur 5 qui ne s’alimente pas dans les restaurants du CROUS car les prix (3€30 le repas) sont trop élevés, preuve d’un système à bout de souffle. »

1€ pour tous

Parmi les répondants à cette enquête nationale, plus de 70% sont des femmes et 92,5% sont tout naturellement âgés entre 18 et 25 ans (3% relèvent du Crous de Bordeaux-Aquitaine). Presque la moitié (47%) ont accès au repas à 1€ (94% sont des boursiers) et 13% bénéficient d’un logement Crous.

L’accès au repas à 1€ pour les étudiants boursiers permet « des repas complets, de manière régulière » souligne la Fage. Celle-ci demande l’ouverture de la tarification à 1€ pour toutes et tous.

Selon le Crous de Bordeaux-Aquitaine, depuis la rentrée universitaire de septembre 2023, plus de 500 000 repas à 1€ ont été servis, soit 51 % de la totalité des repas servis. Ils bénéficient à plus de 32 000 boursiers sur critères sociaux (depuis le 31 août 2020) et sont accessibles à des étudiants non boursiers en situation de précarité constatée par les services sociaux des Crous. 

La Fage souhaite également l’ouverture des RU le soir (72,7% étant fermés), et le week-end (85% fermés). Cette mesure pourrait éviter aux étudiants de sauter des repas (3,5 repas sautés par semaine) et ainsi manger quotidiennement à leur faim, ce qui n’est pas le cas de 28% des boursiers et 16% des non boursiers (la moyenne est de 19%, un étudiant sur cinq).

Sécurité alimentaire

Pour Hugo Lopes, président d’Atena (association territoriale des étudiants aquitains membre de la Fage), « on constate un pic de la précarité estudiantine au début de l’année universitaire et ensuite de manière continue tout au long de l’année » :

« Au sein de notre épicerie solidaire, Le comptoir d’Aliénor, on a déjà dépassé le nombre de bénéficiaires depuis la rentrée en septembre à fin 2023 comparé à toute l’année scolaire dernière, 2022-2023, où on en avait une centaine. Et il reste encore six mois sur 2024. »

Le comptoir d’Aliénor mène des distributions d’aides alimentaires avec la banque alimentaire, l’université de Bordeaux et le Crous. « Sur ces distributions, il y a une augmentation de 123% depuis septembre-décembre, après une année 2022- 2023 qui a connu une augmentation de 70%« . Hugo Lopes résume :

« Globalement, tous les indicateurs montrent qu’il y a une demande assez importante. Particulièrement pour le repas du soir. »

La Fage relève dans son étude que « 49% des étudiantEs n’ont pas les moyens d’acheter des fruits et légumes frais chaque semaine ». En conséquence, elle demande le « développement de la sécurité sociale de l’alimentation, permettant de garantir un droit à l’alimentation pour toutes et tous de manière universelle ».

Distribution d’aide alimentaire aux étudiants Photo : AG/Rue89 Bordeaux

Statu quo pour le logement

L’étude de la Fage affirme par ailleurs que le réseau des Crous a pu proposer au niveau national un logement pour 17 étudiants en 2022-2023. Ce quota est légèrement plus convenable à Bordeaux-Aquitaine et serait de 1 logement pour 8 selon Hugo Lopes :

« Il y a tout de même des écarts entre les villes aquitaines. A Bordeaux, il faut avoir un échelon 7 alors qu’à Pau, échelon 4 [critères d’attribution mis en place par le Crous, à partir des revenus des parents et de critères tels que la distance par rapport au domicile familial, NDLR]. Même si on note globalement une amélioration au niveau de la rénovation, l’état des logements reste à souligner. »

A Bordeaux, le quota serait de 1 pour 13 (10500 logements pour 130000 étudiants) selon une information donnée par l’Union étudiante Bordeaux (UEB) fin octobre 2023. Celle-ci avait mis en cause « des politiques de sous-financement et des logiques gestionnaires depuis plusieurs années » qui ont « asphyxié » le Crous.

« Les chiffres de l’étude de la Fage ne nous étonnent pas, commente Yanis Jaillet, secrétaire général de l’UEB. Depuis notre étude, on peut regretter le statu quo pour les étudiants. Avec l’actualité autour de la loi Immigration qui touche elle aussi les étudiants, ou encore de la Palestine, il y a un silence autour de cette question et pendant ce temps, les étudiants continuent de subir la précarité. »

Facteur d’échec

« S’il y a un besoin de logements croissant, il faut aussi trouver des solutions au niveau du parc privé. Ce qui nécessite un investissement des collectivités qui n’est pas à la hauteur du problème », ajoute Hugo Lopes.

Sur ce point, l’enquête relève que les étudiants contraints de se diriger vers des résidences et bailleurs privés font face à « un défi de taille : trouver un logement étudiant à prix adapté et proche de son lieu d’étude ou accessible en transport en commun ». Selon la Fage, la rentrée 2023 a été marquée par une hausse de 8,95% des loyers, « faisant du logement le premier poste de dépense des étudiants ».

La fédération réclame le gel des loyers et charges locatives, et un investissement du gouvernement dans les parcs locatifs des Crous ; la construction massive de logements étudiants et la priorisation du logement social étudiant dans les plans locaux d’urbanisme des communes à forte population étudiante ; ainsi que la mise en place d’un encadrement des loyers dans l’ensemble des agglomérations sous tension. L’étude conclut :

« Alors que la précarité apparait comme le premier facteur d’échec académique, il est urgent que le gouvernement tienne ses promesses et transforme structurellement notre système d’aides sociales étudiantes, pour garantir à toutes et tous des conditions de vie et d’études à la hauteur. »


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