À peine la hausse des charges à la dernière rentrée digérée, une nouvelle s’annonce pour la rentrée 2024. Les loyers des résidences universitaires du Crous, gelés depuis 2019, vont connaître un bond de +3,5 %. Cette augmentation a été révélée dans Le Parisien par Bénédicte Durand, nommée le 15 février dernier à la tête du Centre national des œuvres universitaires et scolaires (Crous) qui gère le logement étudiant, la restauration et les bourses.
Selon le calcul de la présidente, l’augmentation représente entre 24 et 72 euros par étudiant et par an, une fois les APL (Aides personnalisées au logement) prises en compte. Ce surcoût « très modéré » ne convainc pas l’Union étudiante bordelaise (UEB). Dans un communiqué diffusé ce jour, l’organisation s’inquiète pour les « étudiant·es qui vont sauter encore plus de repas, qui ne vont plus recourir à certains soins et dont les conditions de vie et d’études vont s’étioler ».
« La présidente évoque une augmentation avec les APL sur les loyers les plus bas [autour de 220 euros par mois la chambre, NDLR]. Si on prend la fourchette la plus haute [autour de 490 euros par mois], on arrive à une augmentation de 250 euros par an pour un étudiant qui choisit de ne pas prendre les APL pour éviter de ne plus être à la charge de sa famille, ce qui pourrait avoir des conséquences sur les prestations familiales de la CAF », explique Yanis Jaillet, élu au conseil d’administration du Crous Bordeaux-Aquitaine qui gère 10400 logements étudiants.
Une mesure dictée par le gouvernement ?
Par ailleurs, Yanis Jaillet, également secrétaire général de l’UEB, s’étonne d’une annonce qui n’a pas été soumise aux divers conseils administration, au niveau national comme régional.
« Ça va être débattu dans tous les Crous dès le premier conseil d’administration. Pour Bordeaux-Aquitaine, où siègent sur les 28 membres, 7 représentants des étudiants, on sait que 6 voteront contre. Mais est-ce que cela peut faire changer les choses ? Il se peut qu’au final, ce soit dicté par un décret du gouvernement, et tant pis pour les autres instances. »
Selon la présidente, l’objectif est de « permettre d’accélérer les réhabilitations » qui pourraient concerner 12 000 logements d’ici 2027, avec un pourcentage de logements insalubres estimé à 5% sur l’Hexagone. L’enveloppe globale de ces rénovations s’élève à 115 millions d’euros et le gouvernement participe à hauteur de 25 millions d’euros.
Bénédicte Durand estime que les politiques sociales de ces dernières années, comme le gel des loyers depuis cinq ans et comme le repas à 1 euro (mis en place le 31 août 2020 pour les boursiers), ont fragilisé les caisses des Crous. Dans une communication de janvier 2024, le Crous Bordeaux-Aquitaine affirmait avoir servi depuis la rentrée universitaire de septembre 2023, soit en quatre mois, plus de 500 000 repas à 1€ (51 % de la totalité des repas servis). En 2022, le chiffre était de 600 000 repas à fin mars, soit en plus de six mois (50% des repas servis).
Précarité galopante
Au cours de ces dernières années, les études se sont succédé pour aboutir à un même constat inquiétant sur la situation sociale des jeunes en études. Le 9 mars dernier, l’une d’elles, coréalisée par plusieurs associations étudiantes, sur le campus de l’université Bordeaux-Montaigne concluait que 74% d’entre-eux ont vu leur pouvoir d’achat baisser et 15% se trouvaient obligés de sauter des repas.
La veille de la rentrée dernière, des études ont confirmé une envolée du coût de la vie étudiante bordelaise dont la moyenne mensuelle a été estimée entre 1245€ et 1282€ par l’Unef Bordeaux et la Fédération Atena (Association territoriale des étudiants aquitains), le logement étant le plus gros poste de dépense. Cette crise avait poussé la ministre de l’Enseignement supérieur et de la recherche du gouvernement Borne, Sylvie Retailleau, a annoncé la construction de 10 000 nouveaux logements, jugés peu par les syndicats.
À cette période, Emmanuel Macron avait refusé l’instauration d’une allocation d’autonomie pour les étudiants, en rejetant l’appel lancé par quatorze présidents d’université, parmi lesquels Lionel Larré, président de l’université Bordeaux-Montaigne.
Enfin, alors que le coût de la rentrée étudiante passait le triste stade de 3000 euros, la Fédération des associations générales étudiantes (FAGE) a rendu les conclusions d’une étude nationale en janvier 2024 : la précarité des étudiants explose. En réponse, Bénédicte Durand a annoncé la suppression des frais de dossier des demandes de bourses, qui sont en moyenne de 5 euros, à partir de ce vendredi 1er mars. En France, sur 2,93 millions d’étudiants recensés en 2022-2023, 665 000 sont boursiers.
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